Archives de catégorie : Sport

Délai de pluie

La météo vient souvent jouer les trouble-fêtes lors des tournois de tennis. Chaque fois, aussi bien Radio-Canada, RDS, TVA, etc tombent dans le panneau et parlent de délai de pluie. En un tour de smash, les médias québécois ont trouvé la traduction de rain delay.

Une traduction absurde qui n’a aucun sens en français. Malheureusement, les journalistes ici ont un mal fou à faire la distinction entre le sens français de délai, qui est un laps laps de temps et celui de l’anglais qui est retard.

J’ai écrit un article complet à ce sujet.

Comment rendre rain delay en français? Tout d’abord en arrêtant de penser en anglais. En s’enlevant de la tête que délai est un retard. Non c’est un anglicisme. UN DÉLAI N’EST PAS UN RETARD EN FRANÇAIS. Bien hâte que les médias finissent par le comprendre.

Après cette brève tempête, revenons à la traduction… Le match est interrompu ou arrêté à cause de la pluie. Il connaît un retard à cause de la pluie.

Si l’ondée se prolonge, on peut dire que le match est reporté à cause de la pluie. On peut donc parler d’un report à cause de la pluie, d’une interruption à cause du mauvais temps, etc.

En toute simplicité, on peut aussi dire que la pluie a retardé le match. Ainsi, on évite la faute directe.

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Le tennis en français

Délai

Délais judiciaires

Le baseball en français

Troisième d’une série sur le sport en français.

Le baseball est une énigme enveloppée dans un mystère, pour paraphraser Churchill. Ce sport nord-américain est un descendant du cricket, la différence étant que les parties ne durent pas deux jours, mais quelques heures.

Dans les articles précédents, nous avons vu qu’il est possible de traduire le vocabulaire des sports anglo-saxons. Les Québécois l’ont fait avec brio.

Le terrain

Le terrain est défini par deux lignes à quatre-vingt dix degré. Le champ intérieur a la forme d’un losange composé de trois buts appelés bases en anglais. Le frappeur, appelé batteur en Europe, tente de frapper la balle que lui envoie un lanceur. Le frappeur tente d’y parvenir au moyen d’un bâton, appelé batte en Europe. Le lanceur envoie la balle au-dessus d’une plaque, appelée marbre.

Le champ extérieur est patrouillé par trois voltigeurs, traduction habile d’outfielder. Le champ extérieur est délimité par une clôture, voire une barricade, généralement élevée.

Derrière cette clôture se trouve l’enclos de pratique (bullpen) où se trouvent les lanceurs de relève (relief pitchers).

Le jeu

Si le frappeur tente de frapper la balle, mais échoue, il écope d’une prise (strike). Toutefois, un lancer qui est hors cible est une balle. Une balle frappée hors des limites du jeu est une fausse balle (foulball).

Le frappeur qui subit trois prises est retiré. C’est un retrait au bâton (strikeout). Lorsque le lanceur lance quatre balles à l’extérieur de la zone des prises, le frappeur reçoit un but sur balles (base on balls, walk).

L’équipe en défensive envoie neuf joueurs sur le terrain. En plus du lanceur, le receveur, le premier but, le deuxième but et le troisième but tentent de capter toute balle frappée au champ intérieur, que ce soit au sol ou dans les airs. Le joueur d’arrêt-court complète la brigade défensive. Cette appellation est un calque intégral de l’anglais short stop. Il s’agit en fait d’un intercepteur et c’est pourquoi on l’appelle parfois l’inter.

Lorsqu’un frappeur réussit à frapper la balle, il court vers le premier but. Si elle tombe au sol et qu’il atteint le but avant le tir d’un joueur en défensive, il est l’auteur d’un coup sûr (basehit). Si le joueur peut courir jusqu’au deuxième but, c’est un double, et vers le troisième but, c’est un triple. Si la balle sort des limites du terrain, au champ extérieur, c’est un coup de circuit (homerun). Si trois joueurs se trouvaient sur les buts, c’est un grand chelem (grand slam), emprunté au vocabulaire du tennis.

Le joueur qui parvient à toucher le marbre, après avoir franchi les trois buts précédents marque un point.

Tout joueur frappant la balle mais qui n’atteint pas le premier but avant le tir d’un joueur en défensive est retiré (out). Il est également retiré si un joueur en défensive capte une balle frappée avant qu’elle ne touche le sol.

L’équipe à l’attaque va au bâton tant et aussi longtemps que trois de ses joueurs n’ont pas été retirés. Les deux équipes frappent à tour de rôle. Chaque tour de batte (comme on dit en Europe) est appelé manche (inning) en Amérique du Nord. Un match de baseball comporte neuf manches.

Vocabulaire spécialisé

Le baseball est un sport truffé d’américanismes, évidemment. Sans volonté de traduction, il deviendrait un sabir incompréhensible… comme dans les films européens.

Quelques termes méritent qu’on s’y attarde.

Shoe string catch : se dit lorsqu’un joueur en défensive attrape une balle au niveau des lacets de chaussure, d’où l’expression anglaise. En français : vol au sol.

South paw : désigne un lanceur gaucher. Son bras était souvent du côté du soleil dans les anciens stades, d’où le terme énigmatique et pittoresque de « patte au sud » en anglais. Dans notre langue : lanceur gaucher tout simplement.

Fly ball : balle frappée dans les airs. En français : ballon.

Ground ball : balle frappée au sol. En français : roulant.

Pop fly : balle frappée à une faible hauteur. En français : chandelle.

Infield fly : jeu appelé pour empêcher un joueur en défensive d’échapper la balle pour provoquer plusieurs retraits. En français : retrait automatique.

Wild pitch : balle lancée hors cible par le lanceur. En français : mauvais lancer.

Passed ball : balle que laisse passer le receveur et qui roule au fond du terrain. En français : balle passée.

Double play : lorsque deux joueurs sont retirés coup sur coup. En français : double retrait.

Triple play : lorsque trois joueurs sont retirés coup sur coup, mettant fin à la manche. En français : triple jeu.

 

La traduction d’un tel vocabulaire n’allait pas de soi. Des efforts considérables ont été investis pour mettre à profit le génie du français.

À présent, on ne peut qu’espérer que les films et les livres américains traitant du baseball seront enfin traduits correctement en Europe. Que des anglicismes comme strike et home-run disparaîtront enfin des textes. Et souhaitons que les traducteurs qui ne comprennent rien au jeu cesseront d’écrire n’importe quoi en faisant semblant de s’y connaître, à un point tel que le français est un charabia aussi ridicule qu’incompréhensible.

La solution est simple, traducteurs européens, marchez sur votre orgueil et consultez un francophone québécois ou canadien. Humiliant, certes, mais nécessaire.

 

Articles précédents :

Le golf en français

Le tennis en français

Le tennis en français

Deuxième article d’une série sur le sport en français.

We are tennis. Telle est l’inscription inscrite au dos des t-shirts que portaient les chasseurs de balle au tournoi de Roland-Garros. Pourtant, le tennis, ce sont les Français qui en sont les inventeurs… d’une certaine manière.

Beaucoup de gens le savent déjà, le noble sport britannique tire son origine du jeu de paume français. Lorsqu’un joueur servait, il avertissait son adversaire ainsi : « Tenez. ». D’où la déformation anglaise de tennis. Fait amusant, le mot tennis est revenu par le rebond en français pour désigner un type de chaussure de sport…

Nous avons vu que le vocabulaire français du golf est presque entièrement anglicisé – du moins en Europe. Le tennis, qui nous vient pourtant des îles britanniques lui aussi, a moins subi l’influence de l’anglais. Peut-être à cause de ses origines françaises.

Le tennis se joue sur un court, que l’on prononce comme cour, mot français jadis écrit court.

L’un des joueurs envoie la balle à son ou ses adversaires. C’est que l’on appelle le service, qui, s’il tombe dans le carré de réception et n’est pas retourné s’appelle un ace. Le serveur dont le pied ou le corps dépasse la ligne de service commet une faute, que l’arbitre appelle fault. Si le serveur tire la balle dans le filet, on entendra let ou filet.

Si le serveur tire la balle deux fois de suite dans le filet, il perd le point. C’est ce que l’on appelle une double faute.

Le joueur à la réception peut le retourner d’un coup droit ou encore du revers s’il renvoie la balle sur le côté opposé duquel il tient la raquette. Celle-ci vient aussi du jeu de paume; elle date du XVIe siècle.

La façon originale de compter les points viendrait du nombre de pas que devait reculer l’un des joueurs à la réception du service : 15 tout d’abord, ensuite 30 et finalement 40.

D’ailleurs, le pointage 15 à zéro exprimé en anglais s’inspire lui aussi du français : Fifteen-love, le zéro ayant la forme de l’œuf, déformé dans la langue de Shakespeare : love.

En anglais…

Le tennis vit une histoire d’amour avec la langue anglaise. Si une partie du vocabulaire vient d’Angleterre, un faux anglicisme s’est faufilé… Il s’agit de tennisman, terme qui n’existe PAS en anglais. On dit plutôt tennis player. Un homme tennis est un non-sens en anglais.

Un terme qui revient souvent est passing shot, « Balle rapide en diagonale ou près d’un couloir, évitant un joueur placé pour faire une volée. », nous explique le Robert. La banque de terminologie du gouvernement du Canada, Termium, nous propose coup de débordement ou débordement tout court. J’ai déjà lu placement, qui me paraît plus intéressant. Mais passing, en abrégé, est passé dans l’usage.

Autre expression courante : le smash, un coup que l’on voit aussi au volleyball ou au ping-pong. Le joueur qui smashe écrase la balle pour tenter un coup imparable. Tout le contraire d’un amorti.

Un joueur qui envoie la balle en hauteur effectue un lob afin qu’elle passe par-dessus la tête de son adversaire. Si le joueur a lifté la balle, celle-ci rebondira davantage. On peut également slicer une balle, c’est-à-dire la couper, pour lui imprimer une rotation qui la fera courber.

Le pointage

Compter les points au tennis est assez complexe. Pour remporter un jeu, il faut gagner quatre points et en détenir au moins deux d’avance. Le joueur qui remporte six jeux gagne la manche, qu’on appelle aussi le set.

Jadis, les manches pouvaient s’éterniser lorsque aucun des deux joueurs ne parvenait à distancer son adversaire par deux jeux. On dispute alors un jeu décisif, appelé bris d’égalité au Canada. Malheureusement le terme tie-break semble s’être imposé en Europe.

Le compte des points change. Finis les 15, 30 et 40… Le premier joueur à marquer sept points remporte la manche, s’il a deux points d’avance. On peut aussi bien gagner à 7-2, qu’à 11-9 ou bien 15-13… Ce jeu décisif permettra à l’un des deux joueurs de d’emporter la manche avec la marque de sept à six.

Pour gagner une partie, il faut gagner deux manches. Dans les grands tournois, les hommes doivent en remporter trois. Les grands tournois? Ce sont ceux du Grand Chelem : les Internationaux de l’Australie, les Internationaux de France (Roland-Garros), les Internationaux de Wimbledon et les Internationaux des États-Unis.

 

Prochain article : le baseball en français.

Le golf en français

De l’autre côté de l’Atlantique, en Europe, on semble croire que tout ce qui vient du monde du sport s’exprime d’abord et avant tout en anglais. Ce n’est pas tout à fait exact. On peut traduire, quand on le veut bien. Cet article est le premier d’une série sur le sport en français.

Le golf est une invention écossaise, c’est un fait établi. Quel golfeur n’a jamais rêvé d’aller fouler le terrain mythique de St. Andrew? Ce sport s’est ensuite répandu un peu partout dans le monde.

L’aménagement du terrain de St. Andrews reflète « l’esprit originel » du golf, un véritable parcours du combattant parsemé de fosses de sable, appelées bunkers, et d’autres innommables chausse-trapes.

Une rumeur persistante dit que le mot golf serait un acronyme pour gentlemen only ladies forbidden… À mon sens, elle a probablement pris naissance au dix-neuvième trou devant une chope de bière à la mousse abondante.

Le vocabulaire du golf est probablement le plus anglicisé de tous les sports. Peut-on parler français sur les links ? Bien sûr, en voici la preuve.

Pour jouer au golf, il faut un bâton, appelé club en Europe. Certains crieront à l’impropriété, mais si on se sert d’un bâton pour le ski, pourquoi pas pour le golf? Certains bâtons sont désignés en français : le bois pour les coups en longueur et le fer lorsqu’on se rapproche du vert, pardon, du green.

Le golfeur pose sa balle sur un tee, que certains écrivent té. Assez curieusement, le tee désigne aussi l’aire de départ d’un trou, du moins en Europe. Cette acception est inusitée au Canada. Après s’être réchauffé, le joueur s’élance d’un bel élan (swing); c’est le coup de départ (drive). Au Québec, on appelle souvent driver le bois utilisé à cette occasion.

Le golfeur range ensuite ce bâton dans son sac qu’il tire dans un chariot, à moins d’avoir embauché un caddie, que l’on peut aussi appeler cadet. Évidemment, cela fait moins britannique.

Un bon joueur enverra sa balle au milieu de l’allée (fairway). S’il est plus maladroit, sa balle décrira une courbe vers la droite, qu’on appelle slice. Une courbe vers la gauche est un hook. Ce terme ne figure pas dans le Robert. Les joueurs français tirent donc uniquement vers la droite…

Si votre balle a dévié, elle pourrait aller choir dans un étang ou une trappe de sable, un calque de l’anglais populaire au Québec, car de trappe il n’y a point. Les plus malchanceux iront chercher leur balle dans le l’herbe longue, le rough.

À l’approche du vert, juste traduction du green, le joueur expérimenté approfondira l’utilisation de son arsenal en recourant au wedge, le décocheur, pour son coup d’approche.

Il cherchera à jouer la normale, le par. S’il est talentueux, il jouera un coup en dessous, soit un birdie, parfois traduit par oiselet. S’il est en forme, il pourrait réaliser un aigle, un eagle, voire un albatros. Les joueurs plus médiocres commettront un boggie en jouant un coup sous la normale.

Les professionnels réalisent parfois des prodiges sur le vert avec leurs coups roulés (putts) ultra précis. Putter est tout un art et les coups roulés de plusieurs mètres impressionnent toujours les néophytes.

Au Québec, le vocabulaire du golf est essentiellement français, même si les anglicismes ne sont pas rares, hélas.

Pour mieux connaitre les termes français appropriés, on consultera avec intérêt le site suivant : Lexique sur le golf.

Prochain article : le tennis en français.

Tester positif

La pandémie chinoise reprend de la vigueur. Le président des États-Unis vient d’être déclaré positif à la covid-19. De nombreux membres de son entourage l’ont également attrapé. Karma, diront certains.

L’expression tester positif reprend du service, propagée par les médias français, qui semblent l’avoir adoptée, ainsi que par ceux du Canada. Le président américain, sa porte-parole Kayleigh McEnany et bien d’autres justiciers non masqués ont testé positif. 

Ainsi s’exprime-t-on en anglais. Mais comment le dire correctement en français?

L’Office québécois de la langue française nous offre plusieurs solutions :

  • Être déclaré positif;
  • Être positif;
  • Avoir subi un test positif;
  • Avoir subi un contrôle positif;
  • Avoir obtenu un résultat positif.

Dans le monde du sport, on pourra dire que tel athlète russe a eu un contrôle de dopage positif.

Il est donc très facile d’éviter de tester positif.

Jeux olympiques

Les jeux olympiques de Tokyo battent leur plein, dans un climat étrange, à cause de la pandémie et de l’hostilité de la population japonaise à la tenue de ces bacchanales du sport.

Des jeux étranges aussi parce qu’on y voit de nouvelles disciplines qui feraient sûrement sourciller Pierre de Coubertin, comme le skateboard et la balle molle.

Une discipline exigeante : la majuscule!

Maîtriser les règles d’écriture confuses du française est une tâche ardue. Sur le plan de la simplicité et de la cohérence, notre langue échoue aux qualifications.

Une appellation aussi simple et connue que « jeux olympiques » devrait faire l’unanimité pour ce qui est de l’emploi de la majuscule.

Pourtant, ce n’est pas le cas.

La Charte olympique proclame : les Jeux Olympiques. Évidemment, cette solution ne respecte pas les règles conventionnelles qui dictent la minuscule à l’adjectif, à moins qu’il ne soit en début d’expression. Les juges ont tranché : disqualifiée!

Le Code typographique du Syndicat national des cadres et maîtrises du livre, de la presse et des industries graphiques propose jeux Olympiques. Le Petit Larousse suit le même tracé, qui est celui que l’on retrouve pour certaines appellations toponymiques. Majuscule à l’élément déterminatif, mais minuscule au générique, bref, le contraire de ce qui se fait habituellement. Dans l’usage courant, toutefois, ce type de graphies pour les jeux olympiques est très rare. Faux départ!

Si l’on veut rattraper le peloton de la majorité de la presse francophone, on écrira Jeux olympiques. On rejoindra les rangs d’un grand marathonien, Le Petit Robert, et d’un autre coureur de fond, le Grevisse. Médaille d’or!

Reste l’appellation poids plume, jeux olympiques, employée en début de texte et préconisée par l’Académie française. Curieusement, dans un article de la rubrique Dire, ne pas dire, l’Académie donne comme exemple Les jeux olympiques de Paris; mais elle décide de botter en touche en préconisant la majuscule lorsque le nom de la ville hôtesse n’est pas mentionnée. Donc, les Jeux olympiques tout court.

Encore une fois, les Immortels trouvent le moyen de compliquer tout ce qui pourrait être simple. Carton rouge!

Les Jeux méritent amplement leur majuscule initiale, car ils sont une institution en tant que telle; ils ont remporté la palme (olympique) depuis longtemps. C’est un peu les dépouiller de leurs médailles que de les priver de leur majuscule. Les Jeux olympiques ont plus de panache écrits ainsi.

Les rédacteurs ne voulant pas doper leurs textes de sigles inutiles nous éviteront l’irritant JO. Ils parleront des Jeux tout simplement. Quand le contexte est clair, la majuscule elliptique fait son petit tour de piste sous les acclamations du lectorat en délire.

Qu’en est-il d’olympiade? Ce terme qualifie la période de quatre ans entre les Jeux olympiques. Les Jeux de Tokyo sont ceux de la XXXIIe olympiade et les juges sont unanimes : ce mot s’écrit toujours en minuscule.

Autres articles

Vous lirez avec intérêt d’autres articles que j’ai rédigés au sujet de la majuscule en français.

  1. Les majuscules et minuscules illogiques dans les noms d’époques et de guerre.
  2. La crise des majuscules.

Supporter

Trouvez-vous le mot supporter (prononcé supportaire) insupportable?

Eh bien, vous devrez vous habituer, car il est déjà entré dans les mœurs sportives. À moins que vous ne préfériez être un fan, diminutif de fanatique, qui nous vient aussi de l’anglais. Bien entendu, les amateurs falots diront partisans, mais là, vraiment, vous êtes des tièdes.

En français, le verbe supporter a un sens bien délimité : « Soutenir quelque chose, lui servir d’appui, d’assise. » nous indique le Petit Larousse. Il peut aussi avoir le sens de « Subir quelque chose en y résistant, en y faisant face. »

Nulle part ne voit-on ce verbe décliné dans un contexte sportif. J’ai déjà parlé de ce phénomène des mots orphelins : substantif et verbe concomitant n’ont pas exactement le même sens : spécifier, spécifique.

Comme cela est souvent le cas, le support anglais possède un champ sémantique autrement plus vaste que notre timide supporter. Ainsi, les anglophones peuvent supporter une autre personne (l’appuyer); ils peuvent aussi supporter une entreprise, une cause, etc. Il est donc logique pour eux de supporter une équipe de hockey ou de football.

De là vient le substantif supporter, repris en français. Certains l’écrivent supporteur.

Toutefois, le français se permet quelques variations en puisant dans d’autres langues : aficionado, tifosi. Quand le fanatisme devient violent, on parle même de hooligans.

Le premier mot est un legs de l’espagnol; il désigne un amateur de course de taureaux. Mais son emploi est beaucoup plus généralisé dans notre langue. On peut parler des aficionados du cigare, du whisky, par exemple.

Quant à tifusi, il désigne les partisans italiens de football et de cyclisme.

Les hooligans, eux, constituent un public encore plus ciblé. On parle ici de jeunes partisans violents qui se déchaînent lors de manifestations sportives, par des actes de vandalisme. On se souvient des tragiques évènements survenus en Belgique, il y a une trentaine d’années.

Les incidents d’aujourd’hui à Paris, pendant la période sacrée de l’Euro, viennent nous rappeler que ces tristes individus sévissent toujours. Soit dit en passant, hooligan peut aussi s’écrire houligan, mais attention à votre dentition!

Le tandem supporter (verbe) et supporter (substantif), nous rappelle l’influence déterminante, voire envahissante, de l’anglais dans le vocabulaire des sports.

Disposer d’un adversaire

Les Giants disposent des Pirates… Le lanceur Madison Bumgarner (quel nom!) a disposé de dix frappeurs des Pirates… Ce verbe en apparence très correct foisonne dans  les textes du merveilleux monde du sport. Il apparaît sans cesse dans les dépêches traduites de la Presse Canadienne, dans les textes rédigés par des journalistes de La Presse et du Devoir.

Dans un article précédent, j’expliquais que disposer n’a pas du tout le sens de vaincre, défaire, l’emporter sur.

Donc : les Giants battent ou défont les Pirates; les Giants l’emportent sur les Pirates.

De fait, disposer signifie « avoir à sa disposition ». Il n’a nullement le sens de défaire, de se débarrasser de.

Longtemps, il existait au gouvernement fédéral un monstre linguistique appelé Corporation de disposition des biens de la Couronne. Deux anglicismes pour le prix d’un; c’est ce qui arrive quand des fonctionnaires s’imaginent qu’ils n’ont pas besoin de traducteurs professionnels.

Malheureusement, cette erreur est bien implantée au Canada. On peut toujours tenter de la signaler à ceux qui la commettent, mais beaucoup d’entre eux font la sourde oreille.

Le mondial

La Coupe du monde du football est aussi appelée le Mondial. On oublie souvent qu’au Québec on l’a affublée du nom fictif de Mundial, et ce pendant de longues années. Histoire d’une méprise.

La coupe de 1982 se déroule en Espagne, où, effectivement, elle est désignée sous le nom de Mundial. Les journalistes canadiens empruntent ce terme à l’espagnol et certains commencent à croire que c’est celui qu’il convient d’utiliser.

Le championnat  de 1986 n’arrange rien, puisqu’il a lieu… au Mexique. Rebelote pour le Mundial qui s’incruste dans la langue journalistique, et donc populaire. Le Mundial a remplacé le Mondial. Bien entendu, des puristes essaient de remettre les pendules à l’heure, mais bien peu de gens les écoutent, comme d’habitude. Après tout, Mundial est tellement exotique…

La coupe de 1990 apporte un éclairage nouveau et les convictions commencent à s’effriter. L’Italie est le pays hôte et là-bas on dit Mondiale…

L’édition de 1994, aux États-Unis, a définitivement balayé le Mundial de la langue journalistique et populaire.

Cet exemple illustre à quel point l’usage peut prendre une tournure erronée. Malheureusement, il faut souvent lancer carton rouge par-dessus carton rouge pour finir par se faire entendre.

 

Les métaphores sportives

Un chroniqueur d’automobile qui affirme que tel constructeur devra jouer du hockey de rattrapage s’il veut s’implanter en Chine. Autrement dit, il lui faudra rehausser son niveau de jeu.

L’influence du hockey dans la langue de tous les jours se passe d’explications et ne doit pas être condamnée. Autant accrocher ses patins. Une langue fleurie et vivante ne peut se passer d’images empruntées un peu partout, même au monde des sports. Encore faut-il ne pas sombrer dans la démesure.

Certaines expressions finissent cependant par devenir envahissantes. On peut certainement s’interroger sur le plan de match du pilote du Canadien, Michel Therrien; mais le premier ministre Philippe Couillard a-t-il un plan de match pour redresser les finances publiques? Un plan tout court devrait lui suffire.

Moins fréquentes dans la prose quotidienne, les expressions travailler dans les coins et donner son 110 pour 100 font recette dans la langue parlée. Mais personne ne voudra compter dans son propre filet en les glissant dans un texte sérieux, par exemple un rapport financier…

Pourquoi? Parce que le français est une langue plus formelle que l’anglais, qui recourt volontiers à des images pour enjoliver le discours. En français, il faut être plus prudent.

Un fidèle lecteur de Québec me signalait la propension des médias de l’endroit à utiliser l’expression terrain de football comme étalon de mesure. Bien entendu, à peu près tout le monde a une idée de la dimension d’un terrain de football, mais parler de « Quatre terrains de football de diesel dans la rivière Chaudière » est un peu exagéré. Après tout, le diesel est un liquide, alors il serait plus approprié de parler en termes de litres déversés.

Cette propension à utiliser les métaphores sportives s’explique probablement par l’influence de nos voisins du Sud, qui empruntent bon nombre d’expressions au baseball et au football.

Ainsi, lorsque les Américains font une estimation, ils parlent de ballpark figure, comparaison pour le moins étrange. D’autres expressions s’inspirent du baseball.

To be out in the left field. En français québécois : vous êtes dans le champ, vous vous trompez complètement, vous êtes à côté de la plaque. Laquelle? Le marbre au baseball? Non, puisque cette expression figure dans Le Petit Robert, or, les Français ne connaissent rien au baseball. Il s’agit donc d’une autre plaque. Raté, une prise.

Lorsque vous réussissez un bon coup, vous frappez un coup de circuit, comme nos voisins du Sud : to hit a homerun.

L’expression donner la chance au coureur vient aussi du baseball. Popularisée par René Lévesque, en 1976, elle est bien intégrée au vocabulaire et signifie donner sa chance à quelqu’un, donner le bénéfice du doute.

En fait, je suis persuadé que bien des gens qui l’emploient ignorent de quel coureur il s’agit. Par analogie, rappelons qu’un sketch immortel sur le sport national américain s’intitulait Who’s on first, qui est au premier but? Le coureur, voyons.