Sergueï

Le prénom Serge, qu’il soit décliné en russe ou en ukrainien, en voit de toutes les couleurs. On l’écrit de toutes sortes de manières, le plus souvent de façon erronée.

Qu’on en juge :

  • Pour le russe : Sergei, Sergey, Serghei, Serguei, Sergueï
  • Pour l’ukrainien : Serhii, Serhiy

Mais pourquoi autant de versions? Ceux et celles qui connaissent la problématique de la translittération peuvent sauter les deux prochains paragraphes.

Encore la translittération

Ces variantes existent parce ces deux langues slaves s’écrivent en caractères cyrilliques et que les sons doivent être transcrits dans les langues qui s’écrivent en caractères latins, le problème étant que l’anglais, le français ou l’allemand n’écrivent pas les sons de la même manière. Voir mon article à ce sujet.

Les médias canadiens, et parfois européens, continuent de multiplier les fautes de transcription des noms slaves. Va pour les noms connus de personnalité comme Poutine ou Zelensky. Toutefois le nom de personnes moins connues, comme un général de brigade ou un obscur porte-parole, est trop souvent écrit à l’anglaise, une faute inaperçue.

Sergueï

Le ministre des Affaires étrangères de Russie s’appelle Sergueï Lavrov. En cyrillique : Сергей Лавров. Ceux qui lisent le russe voient tout de suite deux choses : le p cyrillique représente le son G et le й un I allongé. Écrire Sergei est une erreur grossière, car le G devant un E se prononce comme un J en français. Nous aurions donc Ser-Jè. En français, on met un U après le G pour le « durcir », comme dans guerre. Et ei se prononce è, comme dans seigneur.

Écrire Sergey n’est pas mieux, car le G continue d’être prononcé comme un J. D’ailleurs, cette graphie vient de l’anglais.

Sergey

En anglais, le G devant un E peut être prononcé de deux manières. Un G dur comme dans geek ou un G « mou », comme dans generous. Dans le cas de Sergey le G est dur. Le Y marque le I allongé.

Conclusion : il faudrait écrire Sergueï pour obtenir la même prononciation qu’en russe.

Serhiy

Le prénom Serge en ukrainien peut s’écrire de deux façons.

Prenons le cas de Serhiy Jadan, qui s’écrit ainsi en ukrainien : Сергій Жадан. Comme on le voit, le prénom comporte un double I, un I court et le I allongé, qui ressemble à un N à l’envers. En français, cet I allongé est souvent transcrit par la lettre y, d’où la graphie Serhiy.

On voit parfois Serhii, ce qui est une autre manière de représenter le I allongé. Il me semble plus traditionnel d’utiliser le Y.

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Vous lirez avec intérêt les articles suivants :

L’écriture des noms russes en français

Écrire les noms ukrainiens en français

L’ukrainien et le russe

Kiev ou Kyïv?

Autres prédictions pour 2023

Grande-Bretagne

Le roi Charles III arrive en trottinette électrique pour son couronnement. Les services de sécurité ont eu un mal fou à le suivre, surtout quand il s’arrête à un kiosque pour manger un fish and chips sur le pouce.

À l’abbaye de Westminster, la confusion règne : la couronne royale a disparu ! Le prince Harry, qui a refusé d’assister à la cérémonie, a envoyé une vidéo à Scotland Yard pour révéler que c’est lui qui a dérobé la couronne et l’a emportée en Californie. « Mon père n’a jamais voulu me la prêter pour que je joue avec quand j’étais petit. C’est pas juste. »

Des témoins affirment avoir vu Meghan Markle la porter dans une discothèque de Los Angeles.

Le nouveau souverain annonce au lendemain de la cérémonie qu’il renonce à être le chef de l’Église anglicane. « L’État n’a pas à adhérer à quelque religion que ce soit ». Il instaure des séances de méditation zen lors des rencontres de la famille royale.

Charles III décide de convertir les châteaux de Balmoral et de Buckingham en Air B and B pour renflouer les coffres de la Couronne. Le roi déménage discrètement au 10 Downing Street où il loue un sous-sol meublé. Camilla claque la porte et se prend un appartement de luxe dans Kensington.

Musée des beaux-arts d’Ottawa

Poursuivant sa politique de rééducation du public, le Musée interdit l’admission aux personnes blanches et instaure la gratuité pour les personnes racisées. La direction présente un plan de décolonisation complète de l’institution qui passe par l’élimination de toutes les œuvres d’artistes blancs et leur remplacement par des productions autochtones, quelle qu’elles soient.

Les œuvres d’artistes blancs seront toutes brûlées dans une cérémonie d’expiation au cours de l’été 2023.

Réaction de l’Assemblée des premières nations : « Nous n’en demandions pas tant. »

Russie

L’arme russe s’enlise en Ukraine et Poutine est forcé de lever de nouvelles troupes. La population russe, totalement indifférente à l’Ukraine, prend conscience que l’intervention russe est finalement une guerre d’usure, contrairement à ce qu’affirment les médias nationaux. Les manifestations contre la guerre prennent de l’ampleur.

Sur le front, des mutineries éclatent. Les soldats en ont marre d’être mal nourris, sous-équipés et de voir que les corps de leurs collègues morts au combat ne sont même pas rapatriés dans la mère patrie et sont enterrés dans des fosses communes.

Des unités se mutinent et décident de rentrer en Russie. Des troupes fidèles au président essaient de les en empêcher. Des combats entre soldats russes éclatent, sous l’œil médusé des troupes ukrainiennes.

Les services secrets qui ont mis Poutine au pouvoir constatent que la guerre est perdue et que la Russie est déshonorée partout dans le monde. Mais ce sont surtout les sanctions qui touchent les oligarques qui font mal et c’est l’élément qui fait pencher la balance. Il est temps de se débarrasser de Poutine. Le président est assassiné dans sa datcha où il passait du bon temps en compagnie de prostituées mises à sa disposition par le Qatar. Officiellement, Poutine a succombé à la covid.

Le nouveau gouvernement s’empresse de retirer ses troupes d’Ukraine, tout en refusant de négocier quoi que ce soit avec Zelinsky. Pendant ce temps, le Kremlin doit faire place à une grave menace : des graffitis inquiétants sont apparus un peu partout sur les murs de Moscou : Démocratie.

Pendant ce temps aux États-Unis…

Joe Biden quitte la présidence en juillet 2023 après s’être perdu deux fois dans la Maison-Blanche et après avoir déclaré la guerre au Liechtenstein. La vice-présidente Kamala Harris lui succède et devient la première femme présidente des États-Unis. Les ventes d’armes augmentent et le Texas menace de faire sécession.

Du côté des républicains, Donald Trump continue de clamer qu’il a gagné en 2020, mais ses partisans s’éloignent peu à peu de lui, lassés par son discours passéiste. Les choses se compliquent lorsque le FBI découvre que l’or de Fort Knox a été discrètement transféré à Mar-a-Lago. Trump clame : Fake news !

Des milices paramilitaires d’extrême droite, des suprémacistes blancs ainsi que des complotistes et toute une nébuleuse conspirationniste affluent à Mar-a-Lago pour protéger l’ancien président. Ils sont armés jusqu’aux dents. Le FBI tente de pénétrer dans la résidence mais est repoussé par des tirs de roquettes. On compte plusieurs morts. Les Américains cherchent des roquettes dans tous les magasins; Wal-Mart a vendu toutes les siennes.

Le 6 janvier, l’armée est appelée en renfort, mais attend les heures de grande écoute avant de lancer l’assaut. L’opération est spectaculaire et filmée sous tous les angles par les drones des différents médias. Une immense explosion fait voler la résidence en éclats tandis qu’une pluie de dorures tombe sur les soldats américains.

Dans les débris, on retrouve les lingots d’or ainsi que 15 000 courriels de Vladimir Poutine. Les enquêteurs découvrent aussi des enregistrements porno tournés à Moscou, dont Trump est la vedette à son insu. Ils sont immédiatement mis en ligne sur PornHub, une entreprise canadienne.

L’ancien président demeure introuvable et les spéculations vont bon train. CNN annonce qu’il a été recueilli par un sous-marin russe; Fox News dit que Trump est mort, mais qu’il va ressusciter le troisième jour.

L’Église trumpienne du Troisième Jour est immédiatement fondée et les dons affluent. Des flagellants trumpistes parcourent les rues du Bible Belt et annoncent la fin du monde. Certains affirment que Trump a fait des guérisons miracles.

Les ventes d’armes montent en flèche.

Noël

La façon d’exprimer la fête de la Nativité, le 25 décembre, est assez constante dans les langues latines et les langues germanique, bien qu’on y décèle certaines exceptions.

Christmas est une contraction de Christ et de Mass. Le mot viendrait de l’expression médiévale de Cristes Maesse, qui signifie la messe du Christ.

D’autres langues germaniques expriment Noël de différentes manières :

  • En suédois, norvégien et danois : Jul.
  • En islandais (la langue germanique la mieux conservée) : Jólin.
  • En néerlandais : Kerstmis; en afrikkans (qui dérive du néerlandais) : Kerstfees.

Dans ces deux dernières langues, la transparence avec l’anglais Christmas est assez claire : la messe ou la fête du Christ. L’allemand Weihnachten fait bande à part.

Pour ce qui est des langues scandinaves, le lien avec l’anglais est moins clair sauf si on songe au mot Yule, qui apparait dans l’expression Yule log, la buche de Noël. Le mot Yule est un synonyme désuet de Christmas.

Langues latines

Dans les langues latines, le mot Noël renvoie à la Nativité.

  • En portugais : Natal
  • En espagnol : Navidad
  • En italien : Natale

Le roumain fait exception avec Crăciun.

Le français Noël étonne. Il vient du latin natalis dies, qui signifie jour de naissance. Le lien avec la Nativité est maintenu, bien que moins évident par rapport au portugais, à l’espagnol et à l’italien.

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Demain : suite de mes prédictions pour 2023…

Prédictions pour 2023

Cette semaine, trêve de billet linguistique. Un coup d’œil amusé, cynique, voire déjanté sur l’actualité canadienne et internationale avec comme fil conducteur : qu’est-ce qui pourrait bien arriver en 2023?

Changements climatiques

Les dirigeants mondiaux se réunissent de toute urgence sur l’archipel de Tuvalu, à la suite d’une montée des eaux fulgurante que les experts n’avaient pas vu venir. Pendant la conférence, le niveau de la mer connait une hausse de deux mètres, alors que les délégués discutent encore de l’ordre du jour. La salle de réunion étant inondée, ils doivent s’enfuir à bord de pirogues, car l’aéroport est submergé. Les complotistes disent que tout cela est une mise en scène.

Les ministres et chefs d’État s’échouent sur les îles environnantes et sont accueillis par des autochtones qui les narguent et leur disent de se débrouiller.

Le ministre canadien Stephen Guilbault se réfugie à bord du yacht de Pétro-Canada dont les dirigeants faisaient partie de la délégation de notre pays.

Canada

Les désaccords entre le Parti libéral et le Nouveau Parti démocratique s’intensifient. Le gouvernement libéral refuse la demande des néo-démocrates de créer un ministère de la Juste pensée, du Racisme et de la Décolonisation. Le gouvernement minoritaire risque de tomber et des élections anticipées pourraient être déclenchées à l’automne.

À Bay Street, les patrons de Justin Trudeau décident que ce dernier doit partir, car il a perdu toute crédibilité et pourrait perdre les prochaines élections. Certains ministres ambitieux commencent à s’agiter : Chrystia Freeland crée son propre ministère personnel : le ministère de Toutes les affaires gouvernementales; Mélanie Joly veut déclarer la guerre à Poutine; François-Phillippe Champagne s’inscrit à un concours de beauté; Sean Fraser veut admettre un milliard d’immigrants d’ici 2035; le ministre de la Justice David Lametti veut mettre le gouvernement québécois en tutelle, parce qu’il pratique le racisme systémique contre les anglophones du Québec.

Le premier ministre Trudeau met de longs mois à se décider à partir. Il est rapidement recruté par TVA, non pas comme analyste politique, mais plutôt comme comédien dans un nouveau téléroman, Beau Brummel. Le rayon des costumes exulte.

Le retour des camionneurs

Un nouveau convoi des camionneurs est organisé en février pour célébrer l’occupation du centre-ville d’Ottawa, l’année précédente. La police d’Ottawa commence à distribuer des contraventions dans le centre-ville pour permettre aux camions de se stationner. Certains policiers contactent les leaders du mouvement pour prendre des nouvelles.  

Cette fois-ci, les résidents du centre-ville d’Ottawa se sont organisés et ont loué des machines agricoles pour bloquer l’entrée de la ville. Le mouvement fait boule de neige et des débrouillards sèment de clous sur les routes autour de la ville. Les camions sont immobilisés, faute de pneus de secours. Des résidents en furie pour l’an dernier mettent le feu à trois camions et jettent un conducteur dans un spa d’eau glacé.

Sans plan précis, les policiers d’Ottawa accourent, en ordre dispersé. Certains se portent malades et rentrent chez eux. Un camionneur sur le point d’être pendu à un lampadaire est sauvé de justesse par les agents qui l’escortent jusqu’au bureau du chef conservateur Pierre Poilievre.

 Les journalistes

Les reporters dans les médias électroniques arrêtent enfin de farcir leurs topos de commentaires de simples passants qui n’ont rien à dire parce qu’ils ne connaissent rien du sujet. Les journalistes se livrent à une activité nouvelle : le journalisme d’enquête.

Un comité spécial est formé dans les médias pour trouver un synonyme aux mots impact, enjeu et conversation.

La covid en Chine

La Chine arrête de clamer qu’elle est un modèle pour le monde et que la démocratie est vouée à disparaître. Devant la fureur populaire, le gouvernement de Pékin met fin à sa politique de zéro covid. Comme beaucoup de personnes âgées ne sont pas vaccinées et que les vaccins chinois sont moins efficaces que ceux fabriqués en Occident, l’épidémie fait rage et des millions de personnes périssent à cause des politiques du gouvernement. La Chine vit exactement la même crise que le reste du monde a connue en 2020-2021.

Le leader Xi Jinping est aux abois et demande l’aide de la communauté internationale. La réponse est tiède. Extrait d’un appel téléphonique entre Xi Jinping et Justin Trudeau.

– Les vaccins que vous nous avez envoyés sont tous périmés, tonne le chef chinois.

– Ah oui ? On va continuer de faire des efforts pour trouver de meilleurs vaccins pour le peuple chinois.

– Vous nous prenez en otage !

Trudeau sourit et raccroche.

Quelques jours plus tard, Xi Jinping est démis de ses fonctions et nommé directeur d’un camp de rééducation ouïgour.

La révolte des Iraniennes

Les Iraniennes continuent de brûler leurs foulards malgré l’intensification de la répression. Les mises à mort isolent de plus en plus l’Iran de la communauté internationale et ne font que jeter de l’huile sur le brasier de la contestation, qui se répand dans toutes les couches de la société. Bien des gouvernements regrettent d’avoir fermé les yeux sur la vraie nature de la République islamique et commencent à aider l’opposition à s’organiser.

Québec solidaire, le NPD et la gauche européenne accusent les Iraniennes d’islamophobie. Le voile est un choix personnel et ce sont les musulmanes occidentales qui sont vraiment brimées.

Le mouvement fait boule de neige en Afghanistan où des femmes commencent elles aussi à brûler leur voile sur la place publique. Des rassemblements s’organisent pour brûler les burqas, ce qui rend les talibans à moitié fous. La révolte gagne aussi les pétromonarchies, particulièrement l’Arabie saoudite, qui doit lâcher du lest pour étouffer l’insurrection. Une remise en question de l’attitude de l’islam envers les femmes et la modernité commence à être discutée.

Le Printemps des Femmes est commencé.

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Lundi prochain : le couronnement de Charles III ; la décolonisation des musées ; la conclusion de la guerre en Ukraine ; qu’est-ce qui va arriver à Donald Trump en 2023?

Capitaliser

Le verbe capitaliser est souvent employé au Canada et au Québec dans le sens de tirer profit de, profiter de, ce qui est un anglicisme.

Au sens propre, capitaliser signifie « Transformer un revenu en capital », comme l’indique le Larousse. Le mot peut également avoir le sens de « Amasser de l’argent », comme le précise le Robert. Cependant, ce dernier ouvrage ajoute un troisième sens, qui est justement de tirer profit de.

Or, cette acception vient directement de l’anglais, comme le signalent des ouvrages québécois comme le Multidictionnaire de la langue française, Le dictionnaire Usito et le Dictionnaire des anglicismes, de Colpron. En outre, cette formulation est absente du Dictionnaire de l’Académie. Elle n’est donc pas un retour de l’ancien français. C’est bel et bien un anglicisme.

D’ailleurs, le premier sens donné par Collinspour capitalize est bel et bien de profiter d’une situation.

Le Robert donne plusieurs exemples de capitaliser pris dans ce sens. Une courte recherche sur le web montre que cette acception est assez courante en France.

Des mots français infléchis par l’anglais

Ce n’est pas la première fois qu’un mot français voit son sens élargi sous l’influence de l’anglais. On peut penser à réaliser, au sens de « prendre conscience de »; à drastique, au sens d’énergique, de rigoureux; à attractif, au sens d’attrayant.

Dans les trois cas ci-dessus, le Robert indique soit qu’il d’un anglicisme soit que c’est un emploi critiqué.

Il semble maintenant que le dictionnaire ne veuille plus mentionner l’origine d’un sens nouveau, à savoir qu’il est inspiré de l’anglais. Les francophones européens deviennent de plus en plus influencés par l’anglais. Ils ne se contentent plus d’emprunts lexicaux comme black-out (prononcé blaca-outte) ou discount (prononcé discountte), ils rejoignent maintenant les Québécois avec des emprunts sémantiques.

Sur une ferme

Nora a grandi sur une ferme. Voilà une phrase que l’on entend couramment au Canada français. Une faute de syntaxe dont la plus proche voisine est « Il siège sur un comité. »

Ce sont des calques syntaxiques de l’anglais : « Nora grew up on a farm. He sits on a committee. »

Comme je l’ai expliqué à maintes reprises, les francophones du Canada vivent dangereusement proche du monde anglo-saxon et leur langue s’en ressent.

On habite dans une ferme, on siège à un comité.

Êtes-vous sûr?

La confusion entre l’anglais et le français est telle qu’une chatte n’y retrouverait pas ses petits, pour employer une expression populaire. La préposition sur engendre de nombreux calques de l’anglais, calques qui pour un grand nombre de gens sont indétectables parce qu’on les entend partout.

En voici quelques-uns :

  • Être sur un avion – être dans l’avion.
  • Être sur la ligne – être en ligne.
  • Être sur le téléphone – être au téléphone.
  • Surfer sur Internet – surfer dans Internet.
  • Il y a beaucoup de monde sur la rue Principale – dans la rue Principale.

Amusons-nous un peu.

  • Être sur l’avion : j’espère que vous êtes bien attaché… Il fait un froid de canard, demandez une couverture supplémentaire.
  • Être sur la ligne : vous êtes équilibriste?
  • Être sur le téléphone : vous êtes assis dessus?
  • Surfer sur Internet : attention au tsunami!
  • Beaucoup de monde sur la rue Principale? Oui, les gens sont empilés et attendent le feu vert à l’intersection.

Des ouvrages comme le Colpron et le Multidictionnaire en répertorient bien d’autres.

Poly se souvient

Le 6 décembre 1989, un homme abattait froidement 14 jeunes femmes qui étudiaient à l’École polytechnique de Montréal. Parce qu’elles étaient des femmes. Pour le meurtrier, elles étaient des féministes et il fallait les abattre.  

À l’époque, on parlait de meurtre, de tuerie visant des « étudiants » (sic). Aujourd’hui, on emploie le terme féminicide.

Féminicide, un mot dont j’ai parlé dans un précédent article, n’existe pas dans le Dictionnaire de l’Académie française. Honteux. Il faut dire que les Immortels étudient présentement la lettre S en espérant publier la version à jour de leur ouvrage avant la destruction de la planète par les changements climatiques.

Heureusement, le Robert et le Larousse ont intégré ce mot taché de sang dans leur corpus.

Le Larousse : « Meurtre d’une femme ou d’une jeune fille, en raison de son appartenance au sexe féminin. Crime sexiste, le féminicide n’est pas reconnu en tant que tel par le Code pénal français. »

Le meurtre sans nom de ces 14 jeunes femmes ne doit jamais être oublié.

Ayons tous une pensée pour elles en souhaitant qu’un jour féminicide soit devenu un archaïsme.

Diktat

Le mot sonne comme un coup de poing sur la table et c’est probablement ce qu’ont éprouvé les représentants allemands devant les conditions de paix imposées à leur pays par le traité de Versailles, après la Grande Guerre.

Ce sont eux, les politiciens allemands, qui ont imposé le mot , dont le sens ne laisse aucune place à l’ambigüité, et celui-ci s’est propagé en français et dans d’autres langues. En français, il a pris deux sens :

1. Traité imposé par le vainqueur au vaincu.

2. Exigence absolue imposée à un groupe ou à une autre personne.

Employé dans un contexte politique, Diktat a un sens très fort et il n’est pas très courant. Il semble qu’on préfère le réserver à la situation de l’après Grande Guerre. Le deuxième sens a percé dans l’usage, mais il a un concurrent : oukase.

Lui aussi vient du vocabulaire politique et historique. Un oukase est un édit du tsar. Mais lui aussi peut prendre le sens d’ordre impératif.

Dans le contexte politique actuel, il serait certainement pertinent de parler des diktats des mollahs iraniens quant au port du voile islamique et des oukases de Vladimir Poutine à l’Ukraine.

Célébrer

 Peut-on célébrer la Journée internationale des personnes en situation de handicap? C’est ce que m’a demandé un lecteur la semaine dernière.

De prime abord, la formulation ne me parait pas erronée, mais en tant que langagier, ne suis-pas une personne qui doute sans arrêt?

Il faut dire que la formulation naturelle serait de souligner, de marquer une journée. Certes oui, et une petite consultation aux dictionnaires semble le confirmer. Célébrer peut signifier : « Marquer (un évènement) par une cérémonie, une démonstration », nous dit le Robert. Il ajoute : « Faire publiquement la louange de. »

On peut célébrer un mariage, une victoire ou encore les mérites de quelqu’un. L’ennui étant ici que l’ouvrage ne donne pas journée comme cooccurent. Faut-il en conclure que c’est une faute? Pas du tout, car les dictionnaires courants n’énumèrent pas systématiquement toutes les constructions possibles avec un mot. Absence n’est pas erreur.

Une recension dans la Toile permet de découvrir que l’expression « célébrer une journée » se voit surtout au Canada. Cause entendue? Ce qui est canadien est forcément faux? Pantoute!

L’Organisation des Nations unies a une page web sur les diverses journées soulignées dans le monde. En bas de la photo, on remarquera le texte suivant « Des femmes de la Côte d’Ivoire se sont réunies pour célébrer la Journée internationale de la femme… »

La rubrique en-dessous de la photo s’intitule Célébrations.

Mon lecteur curieux, qui voulait en avoir le cœur net, m’envoya ensuite une citation de Racine, dans Athalie : « Je viens, selon l’usage antique et solennel, célébrer la fameuse journée… »

La question était quand même pertinente, car les formulations maladroites s’entendent un peu partout et qu’il faut être vigilant.

En situation de handicap?

Je reviens sur la formulation étonnante mentionnée en début de texte. « Personnes en situation de handicap »? En cette période d’extrême sensibilité, il aurait été risqué de parler des handicapés tout simplement. Même la tournure « personnes handicapées » en aurait choqué quelques-uns. Dure journée…