Véto

Veto est un mot latin qui signifie « Je m’oppose ». Il est invariable. Les réformes orthographiques de 1990 nous permettent de l’écrire avec l’accent aigu : véto. On peut aussi l’écrire avec un pluriel français : des vétos.

Le véto est le pouvoir qu’un individu ou une organisation a de s’opposer à l’entrée en vigueur d’une décision. Les personnes en position d’autorité ont un droit de véto. Par exemple, le président des États-Unis peut utiliser son droit de véto pour invalider une loi adoptée par le Congrès.

Cooccurrences

Quatre verbes sont associés au mot véto.

  • Donner son véto.
  • Mettre son véto.
  • Opposer son véto.
  • Frapper de son véto.

Cette dernière expression nous est moins familière, mais Hugo et Proust l’ont employée.

Erreurs

L’Académie nous signale qu’apposer son véto est une faute. En effet, le verbe apposer signifie « poser sur quelque chose ».

On serait tenté de dire : imposer son véto. Selon moi, il y a redondance, car une personne opposant son véto se trouve à imposer sa décision. C’est sans doute pourquoi les ouvrages de langue ne le proposent pas comme cooccurrence.

Rétribution

Le retour au pouvoir de Donald Trump fait beaucoup jaser dans les chaumières et dans les médias. Le programme radical du criminel à la crinière dorée est en bonne partie axé sur ce que certains ont appelé la rétribution.

J’ai tiqué : une autre cocasserie de l’extrême droite américaine? Que vient faire ce mot en français? On aurait dit un cafard dans un plat de bonbons.

Vérification faite, rétribution n’a qu’un seul sens dans notre langue : c’est l’argent versé pour récompenser un travail. Cela ne cadrait pas avec les propos de l’excellente journaliste Azeb Wolde-Giorghis, dont le français est généralement impeccable.

Il est clair que, dans le contexte, il était question de vengeance et non de somme d’argent. On pourrait aussi parler de représailles. J’ai gentiment repris la journaliste sur le réseau à Musk et elle m’a répondu, avec toute la classe qu’elle affiche à l’écran : « Oh! Vous avez raison, j’avais vérifié rapidement et je pensais que ça pouvait être vu comme vengeance mais non! Merci de la correction! »

Il devrait y avoir un mot féminin pour gentleman.

Président élu

Le retour de Donald Trump à la présidence des États-Unis aura toutes sortes de conséquences. L’effet se fera également ressentir sur le plan de la langue.

Président élu

M. Trump a été élu le mardi 5 novembre, mais il ne prendra ses fonctions que le 20 janvier, lors d’une cérémonie protocolaire qui se déroulera au pied du Capitole. Entretemps, le nouveau président préparera la passation des pouvoirs et choisira les membres de son futur cabinet.

Pendant cette période, Joe Biden continuera d’être président des États-Unis, tandis que M. Trump sera le président élu. Cette expression est un calque de l’anglais president-elect. On ne peut cependant pas affirmer qu’il s’agit à proprement parler d’une grave faute de langue, car le républicain est bel et bien le président élu.

On voit aussi le terme président désigné, qui constitue une excellente solution de rechange, et ne suit pas la démarche de l’anglais. On pourrait aussi parler du futur président, comme le signale l’Office québécois de la langue française.

Inauguration

Il y a quatre ans, j’avais mené une guerre sainte contre cet anglicisme totalement inacceptable en français en alertant plusieurs journalistes canadiens.

En anglais on inaugure un président, mais transcrire cette expression dans notre langue me fait voir… orange.

Le plus souvent, on inaugure un édifice ou un monument. Rarement est-il question d’un concept abstrait, bien qu’on puisse inaugurer une nouvelle politique, comme le signale le Robert. Une inauguration peut être le commencement, le début de quelque chose. Mais inaugurer une présidence me parait quelque peu forcé en français.

La question qui se pose est la suivante : peut-on inaugurer un président? Est-ce que Donald Trump sera inauguré le 20 janvier prochain? La réponse me semble évidente : NON.  Il serait plus juste de parler de l’assermentation, de la prestation de serment du nouveau locataire de la Maison-Blanche.

J’ai étudié plus en détail l’emploi abusif d’inauguration dans un article précédent.   

Ordre exécutif

Lorsqu’il prendra ses fonctions, le nouveau président aura le pouvoir de faire adopter des décrets, appelés executive orders, en anglais. Là encore, le calque est tentant et beaucoup s’y laisseront prendre. Pourtant, les ordres exécutifs ne sont rien d’autre que des décrets.

Tarifs

Le futur président américain est protectionniste, comme ses prédécesseurs. Il projette d’imposer des tarifs élevés pour les importations, ce qui affecte le Canada. Sans doute un raccourci pour tarifs douaniers.

Il serait plus exact de parler de droits de douane.

Pantoute

L’un des signes évidents d’intégration au Québec est l’utilisation de l’expression pantoute. En clair, elle signifie pas du tout, dont elle est vraisemblablement la contraction. On peut aussi la remplacer par aucunement, absolument pas.

Mais pourquoi donc la remplacer? Pantoute, c’est pittoresque, ne trouvez-vous pas?

D’ailleurs, le Robert et le Larousse la recensent, alors pourquoi se priver?

Le Robert indique qu’il s’agit d’un niveau de langue familier et que pantoute renforce une autre négation (pas et rien). Exemple : C’est pas vrai pantoute.

Le Larousse donne un autre exemple dans ce sens : « Ça marche pas pantoute. »

La beauté de la chose, c’est que pantoute peu s’employer de manière absolue.

« Es-tu allé au musée en fin de semaine? – Pantoute. »

C’est clair, net et précis. Objection, quelqu’un? Pantoute? Merci.  

Bête

C’est bête, on n’y pense pas, mais le mot « bête » peut avoir un sens assez différent, selon que vous habitez l’Amérique du Nord ou bien l’Europe francophone.

Une bête, c’est tout être qui n’est pas humain. Une bête féroce, le tigre. Le chat s’est fait écraser par un camion, pauvre bête… (le chat, évidemment, pas de pitié pour le VUS à trois rangées de sièges).

Des expressions colorées

Le mot vedette de cette chronique abêtissante a généré un tas d’expressions savoureuses :

  • Chercher la petite bête. C’est-à-dire être extrêmement méticuleux dans la recherche des erreurs, dans la critique.
  • Navalny était la bête noire de Poutine.
  • Depardieu est une bête de scène (une bête tout court, dirons certaines).

Une personne dominée par ses instincts : pensons à La bête humaine de Zola.

Votre ami est bête, parce qu’il est distrait. Il oublie sans cesse ses clefs de maison, il égare son téléphone.

Mais, le plus souvent, le mot de quatre lettres, comme diraient les anglophones, se réfère à une personne inintelligente. D’où les expressions suivantes :

 « Il est bête comme ses pieds. Il ne comprend rien à rien. »

« Elle n’est pas aussi bête qu’il n’y parait. En fait, elle est astucieuse, elle joue l’innocente. »

« La moitié des électeurs sont bêtes à pleurer. » Je vous laisse deviner où…

Au Québec

Toutes ces acceptions se voient aussi au Québec. Mais, dans notre contrée enneigée, le mot « bête » a pris un sens original : avoir l’air méchant, fâché. Être désobligeant, quoi.

Revenons à l’expression « Être bête comme ses pieds. » En Europe, on parle d’une personne imbécile, tandis qu’au Québec il est plutôt question d’un mufle.

Un exemple : vous entrez dans un magasin et le commis a l’air bête. Il ne veut manifestement pas vous servir et ne répond pas clairement à vos questions.

Et encore : vous faites du tourisme et vous demandez la direction de la gare à un passant. Il a été bête avec vous et a pointé vers la droite, d’un air agacé, avant de tourner les talons. Sale bête, va.

Conclusion

Grande convergence entre le Canada français, l’Europe et le reste de la francophonie, dans le sens traditionnel du mot. Le sens original adopté ici n’est pas (encore) répertorié dans les ouvrages de langue en Europe. Ça viendra sûrement.