C’est bête, on n’y pense pas, mais le mot « bête » peut avoir un sens assez différent, selon que vous habitez l’Amérique du Nord ou bien l’Europe francophone.
Une bête, c’est tout être qui n’est pas humain. Une bête féroce, le tigre. Le chat s’est fait écraser par un camion, pauvre bête… (le chat, évidemment, pas de pitié pour le VUS à trois rangées de sièges).
Des expressions colorées
Le mot vedette de cette chronique abêtissante a généré un tas d’expressions savoureuses :
- Chercher la petite bête. C’est-à-dire être extrêmement méticuleux dans la recherche des erreurs, dans la critique.
- Navalny était la bête noire de Poutine.
- Depardieu est une bête de scène (une bête tout court, dirons certaines).
Une personne dominée par ses instincts : pensons à La bête humaine de Zola.
Votre ami est bête, parce qu’il est distrait. Il oublie sans cesse ses clefs de maison, il égare son téléphone.
Mais, le plus souvent, le mot de quatre lettres, comme diraient les anglophones, se réfère à une personne inintelligente. D’où les expressions suivantes :
« Il est bête comme ses pieds. Il ne comprend rien à rien. »
« Elle n’est pas aussi bête qu’il n’y parait. En fait, elle est astucieuse, elle joue l’innocente. »
« La moitié des électeurs sont bêtes à pleurer. » Je vous laisse deviner où…
Au Québec
Toutes ces acceptions se voient aussi au Québec. Mais, dans notre contrée enneigée, le mot « bête » a pris un sens original : avoir l’air méchant, fâché. Être désobligeant, quoi.
Revenons à l’expression « Être bête comme ses pieds. » En Europe, on parle d’une personne imbécile, tandis qu’au Québec il est plutôt question d’un mufle.
Un exemple : vous entrez dans un magasin et le commis a l’air bête. Il ne veut manifestement pas vous servir et ne répond pas clairement à vos questions.
Et encore : vous faites du tourisme et vous demandez la direction de la gare à un passant. Il a été bête avec vous et a pointé vers la droite, d’un air agacé, avant de tourner les talons. Sale bête, va.
Conclusion
Grande convergence entre le Canada français, l’Europe et le reste de la francophonie, dans le sens traditionnel du mot. Le sens original adopté ici n’est pas (encore) répertorié dans les ouvrages de langue en Europe. Ça viendra sûrement.