Écœurant

Qu’est-ce qui cloche dans la phrase suivante?

Étienne n’arrête pas d’écœurer Émilie dans la cour d’école.

Tout dépend de quel côté de l’Atlantique vous vous trouvez. Au Québec et au Canada français, tout le monde comprend qu’Étienne embête la pauvre Émilie. Mais en Europe et ailleurs dans le monde francophone ce n’est pas si clair. On a plutôt l’impression que ce cher Étienne fait des trucs pour dégoûter sa copine; écœurée par toutes ces manigances, elle est partie en courant.

Pour les profs québécois qui surveillent la cour d’école, il est clair qu’Étienne est un écœurant, un petit voyou qui n’arrête pas d’achaler les autres. Les Français de l’ouest de l’Hexagone auront tout de suite compris que le brave garçon est une petite peste qui importune les filles.

Car Émilie n’est pas la seule. Tannée se faire écœurer, elle s’est plainte à son professeur. En bon français, elle est écœurée de se faire embêter. Bref, elle s’est lassée.

Un québécisme surprenant

En terre québécoise, la langue française se vêt d’atours nouveaux et parfois déroutants. Si le terme écœurant peut receler une connotation négative, il peut également, par une étrange transmutation, devenir un superlatif.

Chez La Patate dorée, ils servent une poutine écœurante!

Bref, une poutine fabuleuse, délicieuse, au summum…

Mais attention, il ne faudrait sûrement pas féliciter le chef à Marseille de la même manière :

Votre bouillabaisse est absolument écœurante! Mes félicitations au chef!

Il est clair que le cuistot sera choqué (sens québécois et français).

Lindbergh

Le chanteur québécois Robert Charlebois a composé une chanson intitulée Lindbergh, ma foi fort amusante à écouter. Le lien ici. Belle introduction à ce billet sur le monde aérien.

Monde agité par des turbulences anglo-saxonnes que l’on pourrait facilement éviter. Encore une fois, des différences notables entre l’Europe et le Québec.

Envolons-nous avec quelques anglicismes.

Tout d’abord, le personnel aérien. Nous avions jadis des hôtesses de l’air, jeunes, jolies et souriantes. C’était la norme naguère. Se sont joints à elles des hommes, que l’on appelle des stewards. Poche d’air… Deux noms complètement différents pour les mêmes fonctions. Heureusement, l’expression personnel de cabine nous sert de parachute, mais le doublet mal assorti existe toujours. Comme on dit au Québec, ça vole bas…

Au Québec, on parle tout simplement des agents de bord. Le terme se décline aisément au masculin et au féminin, sans avoir le vertige ni la nausée. Le mal de l’air, vous connaissez?

Si vous voyagez en Europe, vous prendrez peut-être un charter, c’est-à-dire un vol nolisé. Selon le Larousse un charter se définit comme suit : « Avion affrété par une organisation de tourisme dans le cadre d’un service non régulier. » Vol nolisé est donné comme synonyme.

Enfin, le tout nouveau low cost, un Icare aux ailes de cire, d’une inutilité flagrante, qui se rend par vol à bas prix ou vol à bas coût, nous disent les dictionnaires. Wright on, dirait-on en anglais.

Pour terminer cette chronique aérienne, je vous suggère d’écouter les vidéos particulièrement instructives de cette fausse hôtesse de l’air, Karine de Falchi. Son site s’appelle Air Exxion… Elle est aussi rigolote que coquine, mais on y apprend un tas de choses.

Elle donne des ailes au français.

Bon voyage!

Les douanes

Les Québécois adorent aller se faire bronzer sur les plages américaines, quand ce n’est pas d’aller visiter des villes fabuleuses comme New York, Boston ou Washington.

Les touristes québécois et canadiens courent cependant un risque : celui d’être refoulés aux douanes américaines. Pourquoi? Parce qu’ils portent un nom de famille identique à celui d’un criminel notoire. Les douaniers états-uniens ne sont pas des rigolos, surtout depuis les attentats islamistes du 11 Septembre.

Les touristes malchanceux peuvent être carrément refoulés à la douane américaine.

Les douanes?

Les lecteurs européens, africains et asiatiques ont peut-être tiqué en lisant les douanes. Normalement, on parle de la douane; on pourrait dire aussi la frontière, quand le contexte est clair.

Le pluriel les douanes s’entend continuellement dans les médias francophones canadiens et il s’agit d’un anglicisme. L’anglais nous parle des customs. Il s’agit donc d’un calque syntaxique, insidieux, qui passe inaperçu de ce côté-ci de l’Atlantique.

Les dictionnaires français donnent des exemples seulement au singulier : payer la douane, s’arrêter à la douane, être exempté de douane.

On peut aisément remplacer douane par poste frontière ou poste frontalier.

Un anglicisme?

Le calque me parait évident. Bien entendu si on parle d’un ensemble de postes frontières, on pourra dire les douanes. Mais l’usage penche nettement pour le singulier dans l’ensemble de la francophonie, sauf au Québec.

Autre anglicisme à éviter : les lignes américaines. En français on parle de la frontière américaine.