Nippon

Un nouvel empereur est monté sur le trône du Japon, ce qui marque le début d’une nouvelle ère, baptisée Reiwa (nouvelle harmonie). Naruhito succède à Akihito. Il est monté sur ce que l’on appelle poétiquement le trône du Chrysanthème. Le pays lui-même est surnommé le pays du Soleil-Levant. D’ailleurs, son drapeau blanc est frappé d’un disque rouge symbolisant le soleil.

L’adjectif nippon est parfois utilisé à la place de Japonais. On voit aussi le terme plus savant de nihon, qui correspond à une prononciation plus exacte du nom japonais original. Le mot Japon est en fin de compte une déformation occidentale du nom japonais, ou nippon, si vous préférez. C’est ce qu’on appelle un exonyme.

On peut donc appeler les habitants du Japon des Nippons. Les habitantes seront évidemment des Nipponnes; toutefois, il existe une variante avec un seul n, ce qui donne Nippones. Les joies subtiles du français.

Le Japon a longtemps été fermé à la culture occidentale. De notre côté du Pacifique, nous connaissions bien peu de choses de ce pays fascinant. Après la Seconde Guerre mondiale, le Japon a été occupé par les Américains, qui ont maintenu l’empereur sur le trône, tout en supprimant son caractère divin. Par la suite, le pays est devenu une puissance économique et a renoncé à la constitution d’une armée. Comme on peut l’imaginer, il s’oppose fermement à la prolifération des armes nucléaires.

La réconciliation entre l’Occident et le pays du Soleil-Levant a permis une certaine pénétration de la culture japonaise dans les pays européens et américains.

Bon nombre d’expressions nippones ont pénétré le français, dont beaucoup sont liées à la cuisine et aux arts martiaux. En voici un aperçu :

  • Karaté : technique d’autodéfense.
  • Judo : idem.
  • Ikébana : arrangement floral japonais.
  • Sushi : plat de poisson cru servi sur du riz.
  • Saké : boisson de riz fermenté servie tiède ou froide.
  • Sashimi : tranche de poisson cru servie avec des assaisonnements.
  • Bonsaï : arbre miniature conservé dans un pot.
  • Tatami : tapis traditionnel dans les maisons japonaises.
  • Wasabi : raifort japonais.

Bien entendu certains mots occidentaux ont fait le chemin inverse. On n’ai qu’à penser à biru, une déformation de… bière. Les amateurs de houblon connaissent sûrement la Sapporo, vendue sous nos latitudes.

La tenue des Jeux olympiques d’été de 2020 à Tokyo devrait stimuler davantage la popularité de la culture nippone, qui gagnera encore plus de terrain chez nous.

Je souhaite à mes amis lecteurs d’avoir un jour la chance de visiter le pays du Soleil-Levant. Vous lirez avec intérêt mon texte sur le retour au Canada après y avoir passé deux semaines et demi.

Sayonara!

Podcast sur la traduction des toponymes

La traduction des toponymes ne va pas de soi. Des milliers d’entre eux trouvent une niche en français, mais un nombre encore plus grand demeure sans traduction. Quels sont les pays et les langues pour lesquelles (accord de proximité) on trouve le plus d’équivalents en français?

Voilà un aperçu des réflexions que j’ai livrées lors d’une entrevue en balladodiffusion (podcast) donnée à Angela Benoit pour le compte l’Association des traducteurs américains.

Vous pouvez l’écouter en vous rendant sur le site de l’Association.

Des fanals?

Le français ressemble parfois à une litanie d’exceptions à une règle qui, au départ, semblait d’une grande simplicité.

Le cas du pluriel des mots finissant par –al en est un bel exemple. Pour bien des mots rentrant dans cette catégorie, le pluriel s’impose comme une évidence :

Des animaux, arsenaux, chenaux, hôpitaux, journaux, etc.

Mais quel est le pluriel de mots comme cérémonial, narval, récital? Doit-on dire des cérémoniaux, des narvaux, des récitaux,? Le doute nous saisit.

Tous les mots précédents font leur pluriel en –als. Donc, on dira des cérémonials, des narvals, des récitals.

Mais en vertu de quelle logique au juste? Si on avait décliné le pluriel de ces mots avec le –aux qui semblait être la règle au départ, que serait-il arrivé? Rien. On n’y aurait vu que du feu.

Ce qui m’amène au mot fanal. En entamant la rédaction de cet article, j’étais convaincu qu’on disait des fanals. Mal m’en prit, car mon correcteur surlignait le mot fautif d’un trait de sang. J’étais pris en défaut.

Maintenant, voyons voir si je peux arriver à vous prendre en défaut… Quelle est la bonne formulation?

Des liens causals/causaux.

Des examens finals/finaux

Des œufs pascals/pascaux

Vous avez peut-être compris que les deux formes sont acceptées. Ce qui signifie que nous devons les mémoriser aussi. Voilà donc une troisième catégorie, qui réunit aussi les mots suivants : bitonal, marial, idéal, choral.

En fin de compte, ne serait-il pas plus simple de décider que tous les mots finissant en –al font leur pluriel d’une seule et même manière?

Ce qui pourrait donner ceci :

            Des animals, arsenals, chacals, chenals, chevals, festivals, hôpitals, journals, etc.

Ou encore cela :

            Des animaux, arsenaux, chacaux, chenaux, chevaux, festivaux, hôpitaux, journaux, etc.

Les finales en -ou

Si l’on souhaite un jour simplifier le français, il faudra bien s’attaquer à ces pluriels à deux volets, en mettant fin aux exceptions.

Tiens, on pourrait commencer par cette nomenclature ridicule qui nous donne des joujoux et des poux.

Tout francophone se doit de mémoriser cette célèbre énumération aux allures de comptine : bijou, caillou, chou, genou, hibou, joujou, pou, qui font leur pluriel en mettant un –x final. En fait, il s’agit d’une erreur venant du Moyen Âge.

On disait à l’époque un chol, des chous. Les scribes remplaçaient certaines finales en us par un x pour économiser du papier. Ils écrivaient donc chox. Ils ont par la suite ajouté le u pour faire choux.

Grevisse, que l’on ne peut certainement pas comparer à un maoïste de la langue, ne voyait aucune raison de traiter chou autrement que fou. D’ailleurs, peu de gens le savent, mais l’Académie avait condamné ces pluriels ridicules en 1908 et avait proposé les graphies suivantes : bijous, caillous, chous, genous, hibous, joujous, pous.

Je reprends cette proposition.

Notre-Dame de Paris

Les flammes ont failli détruire ce grand chef-d’œuvre qu’est Notre-Dame de Paris. Cette cathédrale est pour moi un témoin personnel qui a pris une allure symbolique. Elle marque la différence entre le niveau de culture générale d’un Nord-Américain et celle d’un Européen. Je m’explique.

La première fois que j’ai vu Notre-Dame, j’avais vingt ans. Je lisais beaucoup, j’étais curieux, je voulais tout apprendre. Mais je ne savais pas grand-chose.  Devant ce monument j’étais bouche bée, bouche bée parce que je comprenais rien de ce que je voyais. Ce n’était pas les majestueux beffrois qui m’écrasaient, c’était mon ignorance. Pendant une bonne partie de ma vie j’ai pesté devant la pauvreté de la formation générale offerte dans les écoles polyvalentes du Québec. J’aurais adoré suivre le cours classique mais il n’existait plus. J’étais donc condamné au régime public aminci.

Donc Notre-Dame me toisait; elle me dévisageait et semblait me dire « Est-ce tu y comprends quelque chose? » Eh bien non. Pendant toutes mes études secondaires et collégiales, mes professeurs ne m’avaient pas enseigné les notions d’architectures les plus élémentaires. Je n’avais pas suivi de cours d’histoire de l’art non plus. Durant toute ma formation, on n’avait jamais abordé l’histoire du Québec, du Canada, de la France ou de la Grande-Bretagne. À peine avait-on parlé de littérature québécoise. Pour le reste, le néant.

J’aurais été incapable de dire de quel style était la basilique Notre-Dame de Montréal, alors celle de Paris…

En fin de compte, j’ai bâti ma culture générale pierre par pierre, comme tous ces charpentiers, maçons et artisans qui ont érigé Notre-Dame de Paris. J’ai lu le roman du même nom de Victor Hugo quelques années après mon rendez-vous raté avec Notre-Dame. J’étais fasciné et dépassé par la prolifération des détails sur l’histoire de la cathédrale, qui servait de toile de fond au drame de Quasimodo et d’Esméralda.

Puis j’ai enfin commencé à voyager intensivement en Europe. J’ai sillonné l’Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, l’Autriche, la Suisse, le Luxembourg, la France et j’ai parfait ma culture en dévorant les guides Michelin.

C’est la mascotte Bibendum qui m’a enseigné l’architecture, les écoles de peinture, bref les arts en général. J’ai découvert le gothique, le rococo, le baroque. Michelin n’était pas un guide touristique, mais bel et bien un tuteur qui m’expliquait tout ce que je voyais, avec force détails.

Bref, Bibendum s’était substitué à mes professeurs et à mes écoles qui m’avaient tenu dans l’ignorance de toutes ces merveilles. Sauf pour un seul professeur d’art plastique, en secondaire II, qui nous avait montré des toiles impressionnistes. Excellent pédagogue, il nous amenait à faire la différence en un Monet et un Pissarro. Une faible lueur dans la caverne.

Je suis retourné voir la cathédrale Notre-Dame dix ans après ma première visite. Je savais à présent ce qu’était le style gothique pour avoir vu des dizaines d’églises du genre en Allemagne. La cathédrale de Cologne, massive, un véritable mammouth duquel il fallait s’éloigner de 300 mètres pour pouvoir en discerner les flèches. La vertigineuse cathédrale d’Ulm, celle de Fribourg-en-Brisgau. Le gothique flamboyait comme la musique de Wagner.

À présent, Notre-Dame de Paris me considérait avec amusement. Goguenarde, elle me demandait « Qu’est-ce que tu en penses, maintenant? » Ébloui, je mesurais tout le chemin parcouru.

Je contemplais cette merveille. Ses deux tours légèrement asymétriques, juste assez élevées pour en imposer, mais sans jamais écraser le visiteur. Cette magnifique rosace sur le fronton qui ajoutait une touche de couleur discrète. Une façade parfaitement équilibrée, aux dimensions idéales.

Sur les côtés, des arcs-boutants venaient soutenir les murs, de gentilles parenthèses élégantes. J’admirais les contreforts discrets eux aussi, la finesse des remplages sur les fenêtres en ogive. Pour emprunter un lieu commun, de la dentelle de pierre. Le gothique pouvait revêtir des habits plus subtils que ce que j’avais vu en Allemagne.

Comme tout le monde, j’ai grimpé les escaliers de pierre. Au pied des beffrois, j’entendais presque Quasimodo se glisser le long des poutres pour m’observer. « Encore toi? » Les gargouilles lançaient des regards de feu vers la ville. Tout en bas, les touristes semblaient à portée de voix.

Notre-Dame offrait la plus belle vue de la Ville Lumière. J’étais au cœur de Paris, à une hauteur humaine qui me permettait d’admirer la capitale dans toute sa splendeur. Rien à voir avec les hauteurs démesurées de la tour Eiffel.

J’ai revu Notre-Dame en 1992 et encore en 2011, comme si je rendais visite à une vieille amie. Hier, lorsque les flammes dévoraient le toit, j’avais l’impression de perdre un être cher. Mais Notre-Dame renaîtra et j’espère pouvoir verser mon écot à la souscription publique qui s’annonce. J’aurai l’impression de glisser ma toute petite pierre dans l’édifice de la connaissance. Pour qu’il continue de rayonner pour les siècles des siècles.

Addenda de 2024

Notre-Dame reconstruite a été inaugurée aujourd’hui, avec la flèche qui déchire encore le ciel, comme pour taquiner le Seigneur. Décrassée de la suie des siècles, sa nef resplendit de nouveau.

Une lumière éternelle, souhaitons-le.

Hutus et Tutsis

Le drame du Rwanda s’est produit voilà un quart de siècle et il marque encore les esprits. Houtous et Toutsis se sont mutuellement livrés à des massacres. L’objet de ce billet n’est pas de départager les torts, mais plutôt de traiter la question sous l’angle linguistique.

Les lecteurs attentifs auront remarqué les graphies incongrues utilisées dans le premier paragraphe; certains se préparent peut-être déjà à m’écrire pour me signaler les deux coquilles. Pourtant elles n’en sont pas vraiment.

Il s’agit en fait d’orthographes désuètes, abandonnées depuis longtemps par les grands ouvrages et les médias. Bref, ce sont des graphies francisées que l’on utilisait pour désigner les deux ethnies du Rwanda.

En géographie, les graphies anglicisées ne sont pas nouvelles. J’en ai déjà parlé dans des articles sur la défrancisation des noms de ville, notamment. Un cas africain intéressant est celui d’Addis-Abeba, jadis écrit comme suit : Addis-AbÉba, avec l’accent.

Malheureusement, l’anglicisation des toponymes et des ethnonymes a fait beaucoup de ravages en français. La volonté de corriger la situation semble inexistante.

Commençons par le Rwanda lui-même. Son nom était écrit de trois façons dans le Petit Larousse de 1969 : Rouanda, Ruanda et Rwanda. Cette dernière orthographe penche dans le sens de l’anglais et c’est elle, bien sûr, que les francophones ont retenue…

Le pays s’appelait jadis le Ruanda-Urundi.

Il faut dire, d’ailleurs, que les autorités rouandaises ont choisi de donner priorité à l’anglais dans les langues officielles, du pays au détriment du français. Le Rwanda en possède trois, le rwanda, l’anglais et le français.

Les ethnies rwandaises ont également vu leur orthographe être anglicisées. Le Petit Larousse de 1969 parlait déjà de Hutus et de Tutsis. Il y a donc un bon bout de temps que les noms mentionnés au début de ce texte ont été relégués aux oubliettes de l’histoire.

Si les dernières éditions du Larousse ont rectifié certaines graphies anglicisées de noms français aux États-Unis, comme Détroit, Saint-Louis et Bâton-Rouge, il y a loin de la coupe aux lèvres pour d’autres toponymes. Quant aux noms d’ethnies, on peut se demander si des graphies plus françaises seront un jour rétablies. Je me permets d’en douter.

L’OTAN

Le 4 avril, l’OTAN a célébré son soixante-dixième anniversaire. Voici quelques réflexions sur le nom de ce pacte militaire et sur son utilité.

La majuscule

On l’appelle au long l’Organisation du traité de l’Atlantique nord. À remarquer l’utilisation capricieuse des majuscules en français. Le terme générique Organisation en prend une, mais pas le mot suivant traité, qui est pourtant lui aussi le générique de l’expression traité de l’Atlantique nord.

Cette graphie respecte les conventions habituelles de typographie qui prêchent en faveur d’une utilisation parcimonieuse de la majuscule dans notre langue.

L’anglais, lui, n’a pas les mêmes réserves : North Atlantic Treaty Organization. Une majuscule à chaque mot.

La minuscule à traité dérange, d’autant plus qu’on la met parfois à accord, un mot très semblable. Par exemple :  l’Accord de libre-échange nord-américain (RIP), rebaptisé Accord Canada-États-Unis-Mexique.

Mais force est de constater que la minuscule initiale prévaut pour des mots comme traité, convention, pacte et accord.

Cet illogisme relève des règles à mon avis désuètes du français à ce sujet. Voir mes articles à ce sujet.

Appellations officieuses

L’acronyme OTAN est utilisé sur le site de l’Organisation, sise à Bruxelles. Dans la presse européenne on écrit les acronymes – soit les abréviations se prononçant comme un mot – avec la majuscule initiale : Otan. Parmi d’autres appellations connues, mentionnons Unesco, Unicef. Les sigles, par contre, prennent la majuscule à chaque lettre, par exemple l’OMS, l’Organisation mondiale de la Santé. On remarquera la majuscule au deuxième substantif.

L’OTAN est surnommée l’Alliance atlantique. Cette fois-ci, la majuscule orne le générique, contrairement à ce que l’on voit pour le traité de l’Atlantique nord…

Utilité de l’Alliance atlantique

L’OTAN a été fondée à l’aube de la Guerre froide dans le but de protéger l’Europe de l’Ouest contre une invasion de l’Union soviétique. Ce n’était pas une chimère, puisque la puissante Armée rouge s’était avancée jusqu’en Europe centrale à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Par la suite, le pouvoir soviétique n’a pas respecté sa promesse de permettre l’organisation d’élections libres et a implanté des régimes communistes à sa solde.

On peut comprendre que Moscou ait voulu créer un glacis de pays pour prévenir une autre invasion d’une puissance étrangère, l’Allemagne, pour ne pas la nommer. Peu de gens le savent, mais l’invasion nazie a fait quelque 20 millions de morts en URSS. La dévastation du pays, les exécutions massives, sont inimaginables. Nous sommes largement redevables aux Soviétiques d’avoir abattu le nazisme.

L’OTAN reposait sur le principe qu’une attaque dirigée contre l’un des pays membres en constituait une contre tous les pays de l’Alliance. C’est le fameux article 5 de la Charte de l’Atlantique, document fondateur de l’OTAN.

Il est clair que cette disposition a dissuadé l’URSS de tenter de nouvelles annexions en Europe. Si l’Ukraine était aujourd’hui membre de l’OTAN, tous ses alliés atlantiques auraient volé à son secours pour bouter les pseudo-rebelles armés par Moscou hors du territoire ukrainien. En fait, le Kremlin n’aurait jamais osé orchestrer les troubles actuels dans l’est de l’Ukraine.

Contrairement à ce que pense le fou furieux narcissique de la Maison-Blanche, l’Alliance atlantique n’est pas obsolète.

De la désinformation

L’existence même de l’OTAN a toujours irrité les autorités soviétiques et elles ont continuellement essayé de l’affaiblir. Dans les années 1980, des agents soviétiques ont investi le mouvement pacifiste qui s’opposait à l’implantation de missiles de moyenne portée sur le sol de l’Allemagne de l’Ouest.

Les Soviétiques ne disposaient pas des moyens efficaces que sont les médias sociaux – et ils n’avaient pas un président américain à leur solde. Néanmoins, ils essayaient de propager des rumeurs anti-américaines pour déstabiliser l’Allemagne fédérale et semer la confusion. Le mouvement pacifiste et les verts jouaient leur jeu, sans en être conscients.

Ce qui se passe aujourd’hui n’est donc rien de nouveau. Les autorités du Kremlin ont une longue expérience en matière de désinformation. La pagaille qu’ils ont semée au sujet de Hilary Clinton, aidant l’élection de Trump, est un triomphe pour les Russes, un triomphe qui va probablement au-delà de leurs espérances les plus folles.

Après l’Union soviétique

La chute du régime soviétique en 1990, et son remplacement par la Russie, est venu brouiller les cartes. Américains et Russes ont connu une brève lune de miel sous Boris Ieltsine, mais le choses ont changé avec Vladimir Poutine, un ancien chef de KGB (d’où les activités de désinformation et de déstabilisation).

Une des raisons du ressentiment du Kremlin est le fait que l’Occident n’a pas tenu sa promesse de ne pas accueillir d’anciens pays communistes du pacte de Varsovie au sein de l’OTAN.

Très rapidement après la chute du soviétisme, les anciennes républiques populaires d’Europe de l’Est sont venues frapper à la porte de l’Alliance. La Pologne, les pays Baltes, la Hongrie, la Slovaquie et bien d’autres ne voulaient plus jamais subir une occupation par les Russes. L’Alliance les a accueillis.

L’OTAN s’est cherché une nouvelle vocation pendant le bref rapprochement avec la Russie, participant à des missions qui n’avaient rien à voir avec la protection de ses membres. Certains se sont interrogés sur la pertinence de l’Organisation, pendant un bref moment.

Mais l’évolution de la conjoncture internationale vient en renforcer la légitimité.

Germanismes en français

La France et l’Allemagne sont des voisins dont les relations ont été tumultueuses. Néanmoins, le français a quand même emprunté un certain nombre de mots à l’allemand. Certains d’entre eux ont conservé leur forme d’origine, tandis que d’autres se sont fondus dans le décor.

Les emprunts directs

Zeitgeist, l’esprit du temps, au sens littéral, est un terme à la mode. C’est d’ailleurs le titre de la chronique de Josée Blanchette, dans le journal Le Devoir. Le Zeitgeist, c’est la mentalité générale d’une époque, les idées qui ont cours.

L’Allemagne nous a donné de brillants philosophes, dont Schopenhauer, Nietzsche ou Marx. Ils ont tissé leur vision du monde, leur Weltanschauung. Bien sûr, le mot n’est pas indispensable, puisqu’on peut l’exprimer facilement avec des termes français, mais il est nettement plus chic…

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les conservateurs n’éprouvent aucune sympathie pour Justin Trudeau. Ils se réjouissent de ses déboires, ce que l’on appelle en allemand Schadenfreude. Littéralement : joie du malheur.

Pendant l’occupation allemande, en France, bien des produits courants devinrent rares. Notamment le café, remplacé par un ersatz, un succédané. Le Robert précise qu’un ersatz peut être un produit de remplacement de qualité inférieure. Pendant l’occupation, le café était souvent remplacé par de la chicorée.

Bien entendu, la Seconde Guerre mondiale a amené son lot d’emprunts à l’allemand, dont ces chars d’assaut appelés Panzer. On oublie que le Führer avait pris le pouvoir en toute légalité, en 1933. Toutefois, il avait tenté dix ans plus tôt de renverser le gouvernement de Bavière; c’est que l’on appelle le putsch de la brasserie. Le mot putsch est resté et il cohabite avec l’expression coup d’État.

Bien avant Hitler, le chancelier Bismarck avait appliqué une politique pragmatique nommée Realpolitik. Elle était basée sur la défense des intérêts stratégiques du Reich et sur la neutralisation d’ennemis potentiels, comme la France, la Russie et la Grande-Bretagne.

Bismarck a également mené un combat contre l’Église catholique afin de diminuer son influence en Allemagne, ce que les historiens appellent le Kulturkampf.

Les germanismes déguisés

Certains emprunts à l’allemand ont fini par être francisés. Ils ont revêtu des habits français qui font oublier l’origine véritable du terme.

On appelle souvent chenapan un petit garnement. Ce mot dérive de l’allemand Schnapphahn.

On frappe à votre porte? Vous regardez par le judas pour voir s’il s’agit d’un démarcheur ou d’une amie? Vous utilisez un vasistas, mot qui vient de l’allemand Was ist das. Littéralement, qu’est-ce que c’est?

Une ritournelle vous trotte dans la tête? Vous avez un ver d’oreille, terme qui s’inspire du germanisme Ohrwurm.

Ce n’était qu’un aperçu; il y en a bien d’autres. Tschuss!