Checker

Au Québec les emprunts de toutes sortes à l’anglais sont légion et intégrés à la langue sans grand effort. On peut par exemple checker ses wipers qui égratignent le windshield.

Il y a belle lurette que l’anglicisme checker (tchéquer) est employé couramment en terre boréale québécoise. Je fus cependant étonné de l’entendre dans une série policière française, Balthazar.

Le terme en question n’est répertorié ni dans le Robert ni dans le Larousse. On trouve quelques définitions dans le web.

L’Internaute : « Verbe d’origine anglophone (sic) qui signifie « vérifier », « contrôler attentivement »… (Il) est souvent associé à l’idée de tri et d’objectif de résultat. »

Sur le site Je-parle-quebecois.com, on propose les traductions suivantes : vérifier, regarder et écouter.

C’est curieux, j’ai un peu l’impression les Français viennent puiser dans l’intimité de notre patrimoine linguistique. Avant, on pouvait dire à un cousin de « tchéquer ses claques. » avec l’assurance qu’il ne comprendrait rien. À présent, il peut saisir le début de la phrase, mais sûrement pas la fin…

L’espagnol

La langue de Cervantes est l’une des plus répandues dans le monde. Comme l’indique l’Institut Cervantes, l’espagnol « … figure parmi les cinq premières langues du monde en termes de nombre de locuteurs, de nombre de pays où elle est officielle et d’extension géographique. C’est une langue officielle des Nations Unies et une langue de référence dans les relations internationales. » Quelque 500 millions de personnes dans le monde sont hispanophones. L’espagnol est la troisième langue la plus utilisée dans le Web.

Des sources diverses

Comme bien des langues, l’espagnol a puisé dans le réservoir grec pour s’alimenter : bodega (cale) qui vient du grec apotheka. Le latin a donné filosofía et teología.

La présence des Wisigoths a aussi laissé des traces : ganso (oie), guerra et robar (voler). Ce dernier mot n’est pas sans rappeler l’anglais robbery et le français dérober.

L’occupation musulmane, à partir de 711 de notre ère, a amené l’entrée massive de mots arabes dans la langue de Cervantes. Pensons à algarabia (charabia), à comparer au français algarade (altercation); algodón (coton) et Guadalkivir qui, en arabe, signifie « grand fleuve ».

La Reconquesta de 1492 allait tout changer et entrainer la domination du castillan.

Cette fois-ci, c’est le français qui devient source de néologismes. Par exemple manjar (mets); mensaje (message); batallón (bataillon); bayoneta (bayonnette), sans oublier… jardín.

Le Siècle d’or espagnol, de 1492 à 1681, est marqué par le grand rayonnement culturel de l’Espagne, de sorte que le français est encore une fois allé puiser des néologismes en Ibérie. Vous saviez probablement que guitare vient de l’espagnol tout comme grandiose.

D’autres hispanismes suivront au fil des siècles : boléro, gitane, guérilla, intransigeant.

Le castillan d’Amérique

Le français européen diffère de celui parlé en Amérique. Ainsi en va-t-il de l’espagnol sud-américain de celui de la mère patrie.

On observe l’élision du S de la deuxième personne du singulier et du pluriel. Par exemple, puedes se prononce POU-È-DEH; los Indios se prononce LOH INDIOH.

Ceux qui apprennent l’espagnol se heurtent à la jota, ce H aspiré et rocailleux. En Amérique latine, il est considérablement amoindri et ressemble à un H français.

Quant au Z, sa prononciation semblable au th britannique n’existe plus sur notre continent.

Apport de l’anglais

J’ai déjà traité du cas de canceller en français québécois. Eh bien il existe aussi en espagnol, ce qui donne cancelar. Au Québec, on parle souvent de la clutch au lieu de l’embrayage, ce qui est condamné; en espagnol américain ils ont une cloche, qui n’a rien à voir avec une cloche en français.

Le dernier et non et non le moindre : checar. Là encore, les Québécois s’y retrouveront : tchéquer. Il semble que les Français aient été contaminés eux aussi si j’en juge par ce que j’entends dans la série Balthazar.

Espero que te haya gustado este artículo. Saludos a mis amigos españoles.

Addiction

Il est des anglicismes qui finissent par s’installer confortablement en français au point de devenir quasiment indispensables. Non pas parce que des solutions de rechange n’existent pas, mais parce le terme anglais a fini par prendre toute la place. Addiction est l’un d’entre eux.

Le terme est largement utilisé dans la littérature scientifique et dans les médias pour décrire un phénomène hélas trop répandu, soit la dépendance à certaines substances douces, comme l’alcool, le tabac, la marijuana et à des drogues autrement plus puissantes, comme l’héroïne.

Le terme addiction est porteur de sens. Une addiction a de lourdes conséquences sur la santé.

Des solutions de rechange

Selon, le Robert, le terme est entré dans la langue vers 1970 et il a rapidement pris sa place. Pourtant, dépendance aurait été une solution de rechange intéressante.

Certains auraient voulu remplacer addiction par assuétude, qui fait quelque peu endimanché, pour être franc, et ne veut pas dire tout à fait la même chose. Une assuétude est une accoutumance à une substance toxique, donc le fait que l’organisme la tolère de mieux en mieux.

On appelle aussi ce phénomène accoutumance. C’est le fait que le corps tolère de mieux en mieux une substance. Ce phénomène s’observe chez une personne qui boit de grandes quantités d’alcool et qui s’habitue graduellement.

La progéniture

Le terme a engendré une petite marmaille, autre signe qu’addiction a bel et bien pénétré notre langue.

Ainsi, on peut dire qu’une substance est addictive : elle crée une dépendance. Une discipline est née : l’addictologie. Le Robert :

Discipline médicale qui étudie les comportements liés à l’addiction et les mécanismes de la dépendance.

Évidemment, ce n’est pas parce que le terme est entré dans les ouvrages de langue que l’on est forcé de l’employer. La dépendance aux anglicismes, ça se combat.

Sacquer

Les personnes en situation de traduction (!!!) pourraient tiquer en lisant ce qui suit : « La présidente d’un fonds d’investissement est saquée après avoir reconnu qu’elle détournait des sommes considérables pour payer sa résidence cossue à la Barbade. »

On croit voir un autre calque de l’anglais : to sack. Il y a plutôt fort à parier que c’est l’anglais qui, encore une fois, a pillé le français; on pourrait même parler du sac de notre langue par la perfide Albion.

Sacquer (ou saquer) c’est renvoyer sans ménagement une autre personne. Les motifs sont donc impérieux. On ne saurait confondre ce verbe avec congédier, nettement plus nuancé. En effet, congédier revient à indiquer à quelqu’un qu’il doit quitter son emploi.

Les raisons peuvent être multiples : baisse de la demande, surplus d’employés, restructuration, etc. Les personnes touchées ne sont pas vraiment responsables de leur départ, mais plutôt victimes des évènements.

Dans le monde du sport, on va congédier un entraineur, sans nécessairement le brutaliser ou le démolir sur la place publique. On invoquera souvent le désir d’adopter une autre orientation dans la gestion d’une équipe.

Sac

Les dissonances du français ne sont pas nouvelles. Le verbe saquer n’a rien à voir avec le terme sac, dans le sens de pillage. On peut par exemple évoquer le sac de Rome en 1527 sans pouvoir affirmer que la Ville éternelle a été saquée par les pillards. Elle a été pillée, mise à sac.

L’anglais est plus généreux. Le mot sack désigne aussi bien le renvoi d’une personne que le pillage d’une ville. Le verbe couvre également les deux définitions.

Limoger

Ce verbe se voit plus rarement, du moins au Canada.

Le verbe vient de la ville française de Limoges. Le général Joffre y plaça en résidence une centaine d’officiers qu’il jugeait incapables pendant la Grande Guerre. Le terme est resté.

Tout comme pour sacquer, il ne s’agit pas d’un simple congédiement. Limoger, c’est frapper une personne haut placée d’une mesure de disgrâce en la déplaçant ou en la destituant.

L’exemple du capitaine Alfred Dreyfuss est éclairant. Cet homme juif fut limogé après avoir été accusé en 1894 de haute trahison. L’affaire embrasera la France et ouvrira les vannes d’un antisémitisme débridé.  

Difficile dans ce contexte de parler d’un simple renvoi ou congédiement.