Numéro civique

Vous habitez au 215, avenue des Pins. Mais si vous dites tout simplement que vous habitez avenue des Pins, il est probable qu’on vous demande votre numéro civique… du moins en anglais. Mais cette expression est vite passée dans le français canadien… comme une lettre à la poste.

Votre interlocuteur pourrait vous demander votre numéro de porte, numéro d’immeuble, ou plus simplement votre numéro tout court. Numéro civique est un anglicisme.

La virgule

Poste Canada ainsi que les guides de rédaction prescrivent la virgule entre le numéro de porte et l’élément générique. Cette virgule est une absurdité syntaxique; elle ne joue aucun rôle utile dans la phrase, puisque son omission n’amène aucune ambigüité. Que vous écriviez 215, avenue des Pins ou 215 avenue des Pins, le résultat est le même.

D’ailleurs, une petite promenade sur Internet montre que les Européens omettent très souvent la fameuse virgule dans leurs adresses.

La minuscule au générique

J’ai déjà écrit un billet sur les règles capricieuses régissant l’emploi de la majuscule en français. Je faisais mention de ce jeu de bascule étourdissant qui fait passer la majuscule de l’élément générique à l’élément déterminatif dans de nombreuses appellations, notamment celles s’appliquant aux toponymes.

Dans le cas qui nous occupe, le générique avenue ne s’écrit pas avec la majuscule; c’est plutôt l’élément suivant qui la reçoit. Ainsi en va-t-il avec les toponymes. La page de l’Office québécois de la langue française explique clairement l’énonciation des adresses en français.

Pourtant, dans les autres langues latines, comme l’espagnol ou l’italien, on n’hésite pas à mettre la majuscule à l’élément générique qui, il faut le préciser, est placé au tout début de l’adresse, alors que le numéro de porte vient à la toute fin.

Via Antonio Gramsci 14

Pisa

Dans mon ouvrage Plaidoyer pour une réforme du français, je propose de simplifier l’écriture des odonymes en adoptant la majuscule initiale pour les génériques avenue, rue, boulevard, place, etc. Ce qui nous éviterait des acrobaties du genre :

Catherine habite au bois de Boulogne, mais Damien habite rue du Bois-de-Boulogne.  

On écrirait Bois de Boulogne et Rue du Bois-de-Boulogne (l’élément spécifique requiert le trait d’union, autre finesse du français.)

Conclusion

Le retrait de la virgule dans les adresses n’a aucune conséquence fâcheuse et se voit déjà ailleurs. L’adoption de la majuscule à l’élément générique serait également plus simple. Ainsi nous aurions :

215 Avenue des Pins

***

André Racicot vient de faire paraître un ouvrage Plaidoyer pour une réforme du français.  Ce livre accessible à tous est la somme de ses réflexions sur l’histoire et l’évolution de la langue française. L’auteur y met en lumière les trop nombreuses complexités inutiles du français, qui gagnerait à se simplifier sans pour autant devenir simplet. Un ouvrage stimulant et instructif qui vous surprendra.

On peut le commander sur le site LesLibraires.ca ou encore aux éditions Crescendo.

2 réflexions sur « Numéro civique »

  1. M. Racicot,

    D’habitude, vos chroniques sur la réforme du français me donnent de l’urticaire (j’ai une grande résistance au changement!), mais dans le cas de cette chronique-ci, je suis tout à fait d’accord avec vous. Vous allez probablement me convaincre à l’usure de la nécessité et de l’utilité d’une réforme du français. 🙂

    Merci pour vos chroniques et bonne journée!

    1. Lorsque j’ai écrit mon livre, je savais très bien que certaines personnes ne seraient pas d’accord avec moi. En fait, à peu près personne n’est entièrement d’accord avec moi… et c’est normal. L’important, c’est de dialoguer.

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