Une des rumeurs les plus persistantes concernant les rectifications orthographiques de 1990 concerne le mot cheval. Bien des gens, y compris des enseignants, sont convaincus que le pluriel chevals serait maintenant accepté. Devant autant d’ignorance, il y a de quoi ruer.
Faut-il le répéter, les propositions de l’Académie française visaient l’orthographe, pas la grammaire. Il n’a jamais été question de changer le pluriel des mots finissant en -al. Pourtant on devrait. Voici pourquoi.
Une cinquantaine de mots font leur pluriel en –aux : journal, amiral, bocal, capital, éditorial, général, hôpital, mal signal, tribunal, parmi d’autres.
L’ennui c’est qu’on peut recenser quelque 70 autres maux, pardon mots, qui, eux, requièrent le –als au pluriel. Pensons à étal, floréal, narval, pascal, rétinal, santal, virginal.
Qui d’entre nous n’a pas hésité avant d’écrire « des congés pascals. »? Est ce que des congés pascaux auraient paru si surprenants? Probablement pas; bien des francophones n’y auraient vu que du feu, tandis que d’autres auraient ouvert le dictionnaire.
Et les personnes ayant ouvert le dictionnaire auraient découvert que les formes pascals et pascaux sont admises. Ce qui jette un doute sur tous les autres mots…
Un peu de ménage s’impose dans cette écurie. Former le pluriel des mots en –al revient à jouer à la roulette russe, à moins d’avoir une mémoire d’éléphant, dans cette compétition équestre qu’est la grammaire française. Les obstacles ne manquent pas et le francophone se retrouve souvent les quatre fers en l’air.
Henni soit qui mal y pense, si je puis dire…
Peu de gens le savent, mais la graphie de cheval au pluriel résulte d’une erreur de scribe. On écrivait chevals mais on prononçait chevausse, qu’on finit par écrire chevaus. Des scribes voulant gagner du temps et de l’espace commencèrent à remplacer le us par x, ce qui donna chevax. Celui-ci en vint à être prononcé chevau. Ne restait plus qu’à ajouter le u à chevax…
Le même raccourci des scribes explique les graphies marginales de bijoux, hiboux, genoux, joujoux. Une part importante de l’orthographe française résulte de caprices de grammairiens, d’erreurs de transcription et de toutes sortes d’usages illogiques.
Compte tenu que l’on recense un nombre égal de pluriel en –als et en –aux, ne serait-il pas plus simple, pour une fois, de simplifier les règles et d’adopter le pluriel en –als pour tous les noms finissant par –al?
Et n’oublions pas la famille des cousins en -ail : un portail (des portails) et un vitrail (des vitraux). Que d’ails, que d’aulx…
Toujours un plaisir de te lire, André. Tu écris si bien. Et je suis bien d’accord avec ta proposition!
rectifions encore 70 septante et 90 nonante
Découragée de voir cours prénatals devenu prénataux comme si les gens avaient fait un effort pour utiliser la prononciation au pluriel. C’est même rendu dans le dictionnaire.