L’usage du trait d’union demeure l’un des grands mystères de la langue française. J’en ai parlé dans une chronique précédente. L’Académie française a bien tenté d’amener un peu plus de logique en préconisant la soudure de certains termes commençant par des préfixes précis.
Mais des mots comme compte rendu y échappent.
Hélas, le palmarès des illogismes continue de parader, ce qui fait le bonheur des mandarins de la langue.
En toute logique, lorsqu’une expression représente un concept exprimé en deux ou plusieurs mots, elle devrait s’écrire avec le trait d’union. Quelques exemples avec le mot compte.
- Compte-fil
- Compte-goutte
- Compte-pas
- Compte-tour
Jusqu’à maintenant, tout va bien.
Arrive l’expression compte rendu qui, comme on le voit, ne prend pas de trait d’union. On observe donc une rupture de logique, puisque compte rendu est un bel et bien un concept, tout comme un compte-tour, par exemple.
Petite surprise dans le Larousse, cependant. Voilà qu’apparait compte-rendu, avec son trait d’union manquant.
Et pour cause. Il suffit de penser que son petit cousin, procès-verbal, prend bel et bien le fameux trait d’union.
Singulier ou pluriel?
Il va de soi qu’un compte-goutte ne compte pas une seule goutte; idem pour un compte-tour. D’où l’idée d’apposer la marque du pluriel dès le départ, de sorte que les ouvrages de langue signalent une seconde orthographe, avec le S du pluriel : compte-gouttes.
Les noms composés sont truffés de chausse-trapes (admirez le pluriel!). On ne sait pas toujours très bien où mettre la marque du pluriel; c’est parfois au premier mot, parfois au second. L’explication se perd dans la nuit des temps et les Immortels ont résolu en 1990 de sonner la fin de cette récréation méphistophélique. Le S est apposé au second terme… la plupart du temps.
Dans les exemples énoncés précédemment, le mot initial compte ne prend pas la marque du pluriel. Nous aurons donc un singulier et un pluriel qui se confondent : un compte-tours et des compte-tours.
Un agent de la langue ne pourra donc pas dresser un procès-verbal contre vous.
Merci de nous faire découvrir que le Larousse accepte désormais le compte-rendu avec trait(-)d’union. Aussitôt lu… aussitôt utilisé.
Pour les pluriels de noms composés, la préconisation de 1990 de l’Académie fait sauter tous les vieux cas tordus qui ennuyaient tout le monde. Les noms et adjectifs restent au singulier dans le nom composé au singulier, passent au pluriel dans le même nom au pluriel. On ne s’occupe plus du sens, chose qui faisait souvent perdre du temps pour rien.
Pour ‘compte’, il suffit de regarder si c’est le verbe ‘compter’ (invariable) ou le nom :
– Un compte-tour, des compte-tours ;
– Un compte-rendu, des comptes-rendus (rendre compte).
C’est simple et de bon gout…
À mon avis, il faut distinguer l’orthographe de la langue.
Le trait d’union est un mystère de l’orthographe de la langue française.
Cette importante distinction aide grandement à mieux saisir les tenants et aboutiisant de telle ou telle incongruîté qui pour la plupart sont issues de l’écrit, qui n’est autre qu’une convention sociale, et non de la langue.
L’orthographe n’est PAS la langue.
Heureusement! Merci de votre commentaire.
Bonjour
L’avis précédent sur le pluriel donne une sérieuse piste pour le trait d’union :
« il suffit de regarder si c’est le verbe ‘compter’ (invariable) ou le nom ».
Voyez vos exemples :
compte-tour, compte-fil etc. : verbe, trait d’union.
En revanche, compte rendu : nom, flanqué d’un participe adjectif, le compte est rendu, pas de trait.
Idem procès verbal, qui dans cette logique ne devrait pas prendre son trait d’union : le procès est verbal.
Merci André pour cette explication!
Je suis allée voir dans TERMIUM Plus® et la fiche y était.