Start-up est le genre d’anglicisme qui horripile les francophones du Canada. Tout d’abord parce qu’il est très facile de le traduire; ensuite parce qu’il trahit une fascination infantile pour la langue anglaise. La modernité peut aussi s’exprimer en français, croyez-le ou non.
Le président français Emmanuel Macron se gargarise de mots anglais avec une délectation évidente. Ses discours sont truffés d’anglicismes dont certains sont incompréhensibles pour le Français moyen. « La France est une start-up nation. » proclame-t-il avec fierté. Le président fait ensuite remarquer que le mot entrepreneur est un terme français volé par les Anglo-Saxons…
Et bien justement. Il aurait été facile pour le président Macron de s’exprimer ainsi : « La France est une nation d’entrepreneurs. » Tout le monde aurait compris.
L’anglicisme start-up se décline ainsi en français : jeune entreprise, entreprise naissante, entreprise en démarrage, entreprise en développement; les plus audacieux avanceront jeune pousse sur l’échiquier de la traduction. C’est ce que recommandent les autorités officielles en Europe. Mignon, certes…
Tant le Larousse que le Robert définissent start-up comme une jeune entreprise de haute technologie. Bien des Européens se cramponneront à cette fine nuance pour justifier à tout prix l’anglicisme. Mais, au fond, a-t-on vraiment besoin de préciser que l’entreprise œuvre dans le domaine des nouvelles technologies? Le plus souvent, le contexte est éclairant. Le terme jeune entreprise se suffit à lui-même.
Malheureusement, au Canada, nous avons une tendance à éviter le moindre anglicisme lexical sans nous soucier des nuances du message et tout en commettant par ailleurs des anglicismes syntaxiques atroces. Je ne pense pas que le président Macron a voulu parler de la France comme simplement d’une « nation d’entrepreneurs ». Au contraire, j’interprète « start-up nation » comme « un pays propice au développement des nouvelles technologies par de jeunes entreprises à fort potentiel de croissance ». Vous admettrez que cette dernière version n’a pas autant de punch!
En outre, le mot « start-up » se prête à l’interprétation — et vu le contexte, il est fort possible, sinon probable, que ce soit voulu. Voici la définition complète de « start-up » selon le Grand Robert : « ◆ Anglic. Écon. Jeune entreprise innovante à fort potentiel de croissance estimé, dont les activités s’exercent dans le cadre de la “nouvelle économie” (notamment via Internet). Les start-up de la Silicon Valley. »
Voici deux autres solutions proposées par un collègue franco-français : « La France est une nation de jeunes entreprises innovantes » et « La France est une pépinière de jeunes pousses ». Sauf que selon lui, elles sont « moins sexy », car en France, les jeunes entrepreneurs fantasment beaucoup sur le mythe californien.