Passer à travers

L’un des travers des puristes et de bien des langagiers est de voir des anglicismes partout. Ils n’ont pas toujours tort.

On entend souvent l’expression passer à travers quelque chose. La traductrice vigilante, le terminologue à l’affût se méfient à bon droit puisque l’une des définitions de through en anglais comporte comporte le sens suivant, selon le Merriam-Webster :

Arrived at completion or accomplishment.

Par conséquent, l’expression to go through something, peut comporter le sens figuré de subir une épreuve, d’aller jusqu’au bout et de s’en sortir.

Le langagier délivre donc un constat d’anglicisme à son rédacteur.

Minute papillon!

Une simple recherche au dictionnaire nous amène une révélation surprenante : l’expression existe aussi en français! Le Robert :

Passer au travers : échapper à un danger, à qqch de fâcheux.

Le sens n’est pas exactement le même. Si en Europe et ailleurs dans la Francophonie on échappe à une situation difficile, au Québec on la vit d’un bout à l’autre et on s’en sort.  On est donc plus près du sens anglais.

À travers le Canada

Qui ne rêve pas de voyager à travers le Canada, à travers l’Europe ou l’Asie? Anglicisme ou pas? Là encore, les langagiers ont les sens en éveil, flairant la proie.

Comme l’indique le Collins :

To go through a town, area, or country means to travel across it or in it.

En français, aller à travers quelque chose signifie le traverser d’un bout à l’autre, dans toute son étendue. Comme l’indique l’Office québécois de la langue française, il est probable que l’expression s’inspire de l’anglais, quand il est question de géographie, bien que ni le Larousse ni le Robert ne la qualifient d’anglicisme.

Toutefois, force est de constater que de grands écrivains français employaient l’expression eux aussi. Il est peu probable qu’ils aient été contaminés par le français québécois anglicisé.

Le chevalier s’en allait à travers le monde, secourant la veuve et l’orphelin. – Chateaubriand

Si on tient à éviter l’expression, on peut toujours dire Voyager d’un bout à l’autre de l’Asie, partout en Europe, aux quatre coins du Canada, etc.

J’espère que vous ne prendrez pas cette chronique de travers.

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