La langue française ne cesse d’évoluer et les néologismes viennent l’enrichir. Le mot féminicide commence à se propager dans nos médias notamment à cause du meurtre récent au Québec de nombreuses femmes, victimes d’un conjoint dominateur.
Ces assassinats étaient jadis qualifiés de « drame familial », « drame conjugal » ou de « crime passionnel » dans les médias. Heureusement, la terminologie a évolué car ces expressions étaient grossièrement inexactes.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la situation s’envenime. L’Observatoire canadien du féminicide estime que 160 Canadiennes ont été victimes de féminicide en 2020, ce qui signifie qu’une femme est assassinée aux deux jours. À ce sujet, je vous conseille de lire la chronique de Francine Pelletier dans Le Devoir.
Un néologisme bienvenu
C’est clair, féminicide est un néologisme de bon aloi, comme on disait jadis. Il est logique et respecte les règles du français en plus de décrire parfaitement la situation.
Selon Wikipédia, le terme serait apparu à la fin du XIXe siècle. Il est calqué sur le mot homicide. En anglais, femicide est aussi apparu auXIXe siècle. Sa définition est la même qu’en français : le meurtre d’une femme à cause de son genre.
On peut le qualifier de néologisme parce que sa diffusion dans les médias est plutôt récente. Bien entendu, le phénomène existe depuis très longtemps; certaines sociétés et certaines religions véhiculent la notion de « crime d’honneur », qui touche surtout les femmes, particulièrement celles qui cherchent à s’émanciper de la tutelle des hommes.
Il était donc temps que le meurtre des femmes soit qualifié correctement.
D’autres néologismes…
Le mot féminicide brille de tous ses feux quand on le compare à d’autres tentatives de modernisation du français, sous l’influence de la rectitude politique. On a qu’à penser aux sourds et aux aveugles devenus des malentendants et des malvoyants, mots imprécis qui peuvent aussi bien désigner les personnes partiellement ou totalement sourdes ou aveugles. À mon sens, ce n’est pas un progrès d’utiliser ces expressions.
J’en ai parlé dans un billet précédent, le remplacement du mot étranger par international amène son lot d’imprécisions et d’absurdités, comme en témoigne l’expression étudiants internationaux, hélas largement utilisée.
Autre raison de saluer féminicide, en souhaitant que ce terme devienne un jour désuet.
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André Racicot vient de faire paraître un ouvrage Plaidoyer pour une réforme du français. Ce livre accessible à tous est la somme de ses réflexions sur l’histoire et l’évolution de la langue française. L’auteur y met en lumière les trop nombreuses complexités inutiles du français, qui gagnerait à se simplifier sans pour autant devenir simplet. Un ouvrage stimulant et instructif qui vous surprendra.
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