Il pleuvait à seaux ce matin dans ma région, alors pourquoi ne pas parler de chaudière ?
Les Européens qui débarquent au Québec s’étonneront d’entendre dire que leur voisin a arrosé un début d’incendie dans son garage avec une chaudière pleine d’eau. Car, pour les Européens, une chaudière n’est rien d’autre qu’un appareil de chauffage. Un récipient où l’on transforme de l’eau en vapeur afin de fournir de l’énergie.
Donc rien à voir avec un seau d’eau. Enfin presque. Le sens initial de l’expression, nous apprend Le Robert, est : « Récipient métallique où l’on fait chauffer, bouillir ou cuire. » Évidemment, on ne se sert pas d’un seau pour faire chauffer des aliments, mais peut-être que la notion de récipient est le lien ténu qui unit le seau et l’impropriété canadienne de chaudière.
Dans nos contrées, l’appareil de chauffage en question est appelé fournaise. Il s’agit d’une deuxième impropriété. Le Robert la signale : « Chaudière de chauffage central. »
À l’origine, une fournaise était un grand four où brûlait un feu ardent. Probablement qu’on s’en servait aussi pour chauffer les chaumières, ce qui expliquerait que les Anglais aient adopté le mot furnace, venant du français, pour désigner un appareil de chauffage. Force est de constater que lesdits appareils ont bien évolué depuis lors.
Les Canadiens chauffent donc leur maison avec des fournaises au gaz ou… à l’huile ! Autre énigme pour les Européens. Eux mettent du mazout dans leurs chaudières… Utiliser cette terminologie avec un représentant d’Esso, par exemple, risque de déboucher sur un dialogue ésotérique…
L’huile, parlons-en.
Les Américains utilisent le terme générique oil pour désigner ce que les Britanniques appellent petroleum. Le Britannique qui fait le plein va à une petrol station, tandis que l’Américain ira à une gas station.
La chaudière est pleine, arrêtons cette chronique ébouriffée du lundi matin.
Qu’un terme ait un usage au Canada différent de l’Europe, il n’est pas pour autant une impropriété. À la rigueur, on pourrait parler d’un régionalisme. C’est ainsi que le mot est caractérisé dans le dictionnaire du Centre national de ressources textuelles et lexicales:
https://www.cnrtl.fr/definition/chaudi%C3%A8re
4. Région. (Canada). Seau métallique. La mère s’est mise à voyager à la rivière avec une chaudière dans chaque main (HÉMON, Maria Chapdelaine,1916, p. 235).
Et pourquoi pas parler de québécisme? Et pour les lecteurs et lectrices d’un certain âge, on pourrait même parler de canadianisme de bon aloi?
Ce que je trouve un peu intrigant ici c’est qu’on parle en 2019 de mots largement critiqués pour les mêmes raisons dans le Dictionnaire des difficultés de la langue française au Canada publié en 1967 par le grammairien Gérard Dagenais. Faut-il croire que 52 ans plus tard, on fait les mêmes erreurs?
L’histoire a fait en sorte que chaudière, fournaise et même huile de chauffage s’utilisent autrement en Europe. Soit. Ce n’est pas pour autant qu’il faut condamner l’usage québécois. D’ailleurs il est fort intéressant, pour ne pas dire ironique, que le terme le plus utilisé en France pour désigner notre huile de chauffage n’est pas mazout mais fioul qui ressemble à s’y méprendre à fuel.
Les Européens qui s’installent au Canada s’attendent à des usages langagiers différents. Comme c’est le cas lorsque les Belges, Français et Suisses se promènent d’un pays respectif à l’autre. Il ne viendrait pas à un Français de dire que nonante est une impropriété suisse ou belge. C’est différent, c’est tout.
Dans cette même logique, il est à prévoir que sous peu le mot maîtrise qui désigne encore nos diplômes universitaires de 2e cycle va devenir une impropriété canadienne parce qu’en Europe il a été remplacé par master dans le cadre de la réforme LMD.
Quant à l’usage dans les pays anglophones de oil, petroleum, gas et petrol, il y aurait beaucoup à dire. Mais ce qui est à retenir c’est que s’agissant de gas et petrol personne ne parle d’impropriété.
Monsieur Allard, je suis tout à fait d’accord avec vous…
Que le sens de certains mots (comme notre fameuse chaudière) ou expressions aient pu changer, soit ! Je ne vois pas d’impropriété, par contre, il y en aurait long à dire sur l’usage de plus en plus répandu de mots anglais en France. Je pense au mot leasing… utilisé largement là-bas (Leasing Renault..Leasing Citroën etc..) Ici, on parle plutôt de location d’autos.
Tout un nouveau vocabulaire a envahi le domaine des ressources, des affaires, d’ailleurs un film avait été fait sur le sujet, une comédie. Là-bas, il faut en rire, mais au Québec, ça ne passe pas et c’est bien tant mieux!
Bonjour !
non ! ça ne passe pas .Je viens d’entendre sur une chaine Française : » le terroristre voulait se faire tuer by cop , des policiers… »( dans la même phrase) ???? désarçonnant !
Réveillez-vous bordel ! ( titre du livre )
La tranquille soumission de la France â l’Anglais
Préface d’Alain juppé
Vérone éditions ( 80 p)
l’auteurPatrice Dallaire est diplomate de carrière, diplômé en relations internationales et en science politique. Il a été conseiller spécial du Premier ministre du Québec, Représentant du Québec au Canada, diplomate en Chine et Secrétaire adjoint au Ministère du Conseil exécutif (Premier ministre) du Québec.
En réalité, en français, tous ces mots se réfèrent à un même produit, à savoir le combustible de chauffage à usage domestique, c’est-à-dire celui que vous utilisez dans votre chaudière pour chauffer votre logement et votre eau chaude sanitaire. Il s’agit uniquement de petites différences linguistiques.
Pas d’inquiétude donc, vous pouvez commander aussi bien du mazout que du fioul ou du gasoil de chauffage : c’est le même produit qui sera livré dans votre cuve, ou votre … chaudière. Il n’y a pas non plus de distinction entre le prix du mazout et celui du fioul puisqu’il s’agit de la même énergie. La seule différence de prix pourrait venir d’une différence entre un fioul de chauffage 50 ppm ou 10 ppm de souffre.
Au Canada et en Suisse, on entend également le terme « huile de chauffage ». Par contre, les Français ( évidemment !) emploient davantage le mot « fioul ». Ce terme provient lui-même ( phonétiquement) de l’anglais « fuel », qui est parfois aussi utilisé en français.
Pierre-François Thernier Shefford, Québec
Fournaise en France a aujourd’hui le sens de très grande chaleur, généralement incontrôlée. Ce n’est plus un objet, mais une évaluation de la température jugée comme insupportable et dangereuse.
Pourquoi le sens a changé en France ?
Peut-être qu’à force de voir les « fournaises » exploser dans les usines ou mettre le feu à toute la maison, les vendeurs de « fournaises » ont trouvé judicieux d’utiliser d’autre mots plus rassurant.
Dans mon esprit français, « chaudière » évoque le chaud et le douillet, une chaleur bienveillante, et « fournaise » un danger à fuir 🙂
Dernier commentaire( Philippe )..tient la route !