Huile

Le mot huile semble bien innocent comme cela, mais il peut nous mener sur des chemins de traverse parfois surprenants.

On le sait, une huile est une substance grasse, onctueuse et liquide, parfois inflammable.

Le mot a toutefois une connotation un peu différente au Québec, sous l’influence de l’anglais, comme cela arrive souvent.

Chez nous, on parle d’huile à chauffage et non de mazout. L’huile à chauffage est brulée dans un appareil à combustion appelé … fournaise.

La terminologie internationale nous donnerait une chaudière au mazout. Cette expression serait incompréhensible au Canada français, une chaudière étant un seau d’eau.

Le monde de l’automobile

Les expressions liées au monde de l’automobile sont lourdement influencées par l’anglais au Québec. Lorsqu’on confie sa voiture à un garagiste, il est normal de lui demander un changement d’huile. Imaginez la tête d’un garagiste européen ou africain…

En fait, il est question d’une vidange d’huile. Dans ce cas précis, le client ne parle pas de mazout, mais bel et bien d’huile à moteur.

En français classique, on remarque plusieurs expressions intéressantes avec le mot en l’objet.

  • Baigner dans l’huile : quand tout va bien.
  • Faire tache d’huile : se répandre.
  • Jeter de l’huile sur le feu : empirer les choses.
  • Les huiles : les personnages importants.

Cette dernière expression ne manque pas d’intérêt. Les huiles, c’est le gratin, ce qui remonte à la surface.

De l’huile au mazout…

Le lien entre le mot huile en français et le oil anglais saute aux yeux. C’est dans le domaine des hydrocarbures que les pistes s’enfoncent dans les sables bitumineux de la sémantique.

Oil peut désigner de l’huile à chauffage, appelé mazout, comme nous l’avons vu. Le mazout – un mot russe – peut aussi être appelé fioul, un terme inusité au Québec, une corruption de l’anglais fuel.

Mais oil est aussi un terme générique pour parler du pétrole en général. Sauf que nos amis britanniques parlent de petrol lorsqu’ils font le plein; en français, essence. Mais petrol se dit gas en anglais américain, bien qu’il ne s’agisse pas d’un gaz.

D’où l’expression québécoise Mettre du gaz dans son char. Une belle pièce de dialecte qui pousserait le pompiste de Tournai à aller écluser une gueuze pour essayer d’y comprendre quelque chose…

Non, les Québécois ne conduisent pas des panzer… Le mot char vient de l’anglais car.

(Soit dit en passant, les VUS délirants qui encombrent les routes nord-américaines méritent bien d’être appelés des chars, au sens traditionnel du terme.)

De l’huile à la bière…

Le mot huile a des petits cousins inattendus dans les langues germaniques. En allemand, on dit Öl, en suédois ojla, en norvégien ojle. Mais il est étonnant de constater que tant en suédois qu’en norvégien, les mots öl et øl renvoient non pas à l’huile mais à la bière!

L’anglais n’a pas uniquement subi l’influence du français, il est aussi une langue germanique. S’il peut paraitre curieux de boire de l’öl dans les langues scandinaves, n’oublions pas que Britanniques et Canadiens ne dédaignent pas une pinte de bonne ale par temps chaud.

Fin de cette chronique néo-dadaïste rédigée sous la canicule. Devinez ce que je vais faire à présent…

2 réflexions sur « Huile »

  1. Bien huilé ton article, André !
    Je me bats au quotidien avec tous ces calques, que je suis forcée d’emprunter pour me faire comprendre.
    En plus, aller au garage pour faire la vidange pourrait laisser croire qu’on apporte ses poubelles chez le garagiste…

  2. D’où le classique « Filtre à huile » pour l’ENA ou autre école sélective dans les mots fléchés français.

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